Inceste - Partie 2

La réalité de l'inceste [modifier]

L’inceste, malgré la difficulté pour les chercheurs d’établir un indice de prévalence, est très répandue et son phénomène est transgénérationnel. L’inceste est vécu dans la honte et le secret. En fait, l’inceste est un piège qui enferme la victime et les témoins.

Dès sa naissance, le corps de l’enfant est livré à sa famille, puis à des proches, et de tous temps, cette vulnérabilité a poussé des adultes à en profiter. Cette violence impensable est enfouie en nous, elle court-circuite nos pensées et nos actions. Nous ne voulons pas la voir. Les familles incestueuses suscitent en nous des mécanismes inconscients de défense. Nous les mettons en place à notre insu, pour sauver nos représentations parentales, notre idéal familial ou professionnel, et plus largement notre vision de l’humanité. Prenons garde à ces idéologies qui nous font refuser l’évidence du mal et nous protègent de l’angoisse.

En fait, on estime que 90% des cas d’abus faits sur les enfants ne sont pas déclarés aux autorités. On sait que près de 80% de tous les abus sexuels commis sur des enfants sont l'œuvre de proches parents ou de connaissances de la famille.

Selon un sondage mené au Québec, en 2002, 25% des répondants disent connaître au moins une personne qui a été sexuellement agressée dans son enfance. Ce pourcentage augmente à 35% chez les personnes âgées de moins de 35 ans.

Il faut savoir qu’un enfant victime d'inceste subit une profonde blessure, un affront qui condamne la croissance et le sain développement de son identité. Il s’agit d’une blessure identitaire d’une violence si marquante, si déroutante que la victime s'acharne, par tous les moyens, à ne pas reconnaître l'intolérable vérité de ce qu'on lui a fait subir. Chez cette victime, le risque de toxicomanie est sept fois plus élevé et le risque de suicide est multiplié par dix.

Il est important d’adresser cette problématique, d’en parler ouvertement, afin de briser le silence dans lequel les victimes sont enfermées et stigmatisées. En leur offrant des espaces d’accueil et de non-jugement, nous permettons aux victimes de raconter leur récit (sans toutefois les y contraindre), et de se reconstruire.

Il est important d’en parler ouvertement afin de démystifier la froideur de ce mal silencieux, d’offrir aux victimes une écoute empathique et d’exiger la mise sur pied de ressources adéquates en matière d’intervention, de formation, de prévention et de recherche.

Une autre réalité de l'inceste [modifier]

Le plaisir honteux de la victime (la dualité plaisir-abus sexuel) [modifier]

Un aspect semble résister à la volonté de faire la lumière sur la question de l'inceste : il s'agit du fait que de nombreuses victimes ressentent du plaisir sexuel au cours des abus. Cette réalité est en effet systématiquement occultée dans la plupart des discussions publiques. Hors le plaisir sexuel chez l'enfant est possible, fréquent et naturel, même en situation d'abus. L'enfant peut éprouver du plaisir sexuel et peut avoir un corps qui répond aux stimulations, même si ses organes génitaux ne sont pas entièrement développés et que les hormones qui accompagnent normalement la maturité sexuelle sont absentes. Un enfant ne répond pas aux stimulations de la même manière qu'un adulte mais, s'il est stimulé sexuellement, cela lui sera physiquement agréable. Il s'agit désormais de faire disparaître les idées préconçues comme "il a aimé ça donc il le voulait".

"l'enfant ne peut pas s'empêcher d'être physiquement excitée et cette expérience interfère de façon désastreuse dans le déroulement normal de son organisation sexuelle. En étant forcée d'entrer prématurément dans une relation phallique ou génitale, ses besoins réels et l'expression intellectuelle qui les accompagnent sont outrageusement bafoués." Anna Freud 1981, citée dans Ratan 1992, p.33

Cette expérience du plaisir aggrave, plutôt qu'elle n'atténue, les séquelles de l'agression. Les enfants qui ressentent du plaisir sont bouleversés par cette réalité, se sentent complices, coupables, s'en attribuent la faute et , n'ont pas consciences d'être les victimes d'un agresseur. L'enfant reçoit le plaisir comme un choc et comme une trahison de son corps. La victime se verra par la suite aux prises avec des problèmes graves dans son développement personnel, affectif et sexuel ainsi que dans ses relations au monde et aux autres. [1]

Anthropologie [modifier]

Marque de puissance de la société ? [modifier]

De nos jours, un des fondements de beaucoup de sociétés humaines est de proscrire l’inceste. Certains sont même plus catégoriques : une société naît lorsqu’elle définit les frontières de l’inceste. Disons qu’un tel interdit témoigne en tout cas de la puissance des structures sociales qui s’imposent aux choix de l’individu.

Le danger de la banalisation et de la mésinformation [modifier]

Le risque de banaliser cet acte criminel est de maintenir et de valider la perpétuation d'un crime transmis de façon transgénérationnelle. On ne sait pas avec certitude si cela résulte d’observations biologiques (l’Église catholique s’opposait aux mariages consanguins dès le Moyen Âge, et l'islam s'y oppose depuis plus de 14 siècles , bien avant la découverte de la génétique), ou simplement d’une habitude venant du fait que l’inusité (quel est le frère qui peut avoir envie d’épouser sa sœur, tant elle présente peu de mystère pour lui ?) prend en quelques générations dans une société coutumière le statut d'interdit - puisqu’on a là à faire à un comportement qui ne s’est jamais vu, à une chose qui ne se fait ordinairement pas.

L’argument génétique [modifier]

L’inceste, avant d’être un facteur de dégénérescence, est un moyen de renforcer les gènes récessifs. Bien que la plupart des gènes récessifs soient nocifs (sans quoi ils seraient vite devenus dominants), certains ne le sont guère (mutations neutres). La réalité a certainement des explications tenant à la sociologie.

L’argument sociologique [modifier]

Les ethnologues considèrent souvent que la prohibition de l’inceste est commune à tout ce qui n’est pas aristocratie dans les sociétés humaines (d’où l’exception des pharaons, l’endogamie des souverains d’Europe, l’existence de rallyes dans la très haute bourgeoisie, etc.).

Claude Lévi-Strauss y voit l’articulation entre nature et culture, le fondement social. Le message n’est pas selon lui « N’épouse pas ta sœur », mais bien plutôt : « Donne ta sœur en mariage à ton voisin ».

L’exogamie serait selon lui à la base des échanges et des alliances entre groupes sociaux, leur permettant de s’affirmer en tant que tels. La prohibition de l’inceste serait alors le fondement de l’exogamie en interdisant l’endogamie (dont les limites varient fortement d’une société à l’autre) et le tabou de l’inceste serait alors une construction sociale destinée à défendre l’exogamie en tant que fondement de la société.

Cette approche a toutefois été vivement contestée par certains ethnologues (voir tabou de l'inceste).

Les couples incestueux unis dans le consentement mutuel entre adultes et non-mariés ne sont pas toujours prohibés par la loi (en France, le mariage avec un degré de parenté supérieur à celui de cousins germains demande une dispense), mais le sont parfois par les mœurs.

Malgré l’interdit qui l’accompagne et que Freud croyait universel, l’inceste reste un phénomène non marginal. Lorsqu’il concerne un enfant (mineur sexuel) et un adulte de la même famille, il s’effectue souvent dans un contexte d’abus sexuel, accompagné de secret et de culpabilité qui pèsent lourdement sur les victimes du tabou - ou plus simplement de la violence effectuée sous forme de pression.

L’inceste dans les mythes [modifier]

  • Dans la mythologie gréco-romaine, Zeus/Jupiter est marié avec sa sœur Héra/Junon.
    • Parmi les mythes grecs celui d’Œdipe qui sans le savoir tue son père Laïos et épouse sa mère Jocaste. On remarquera que la ville mentionnée est Thèbes et l’animal un sphinx, ce qui n’est pas sans rappeler le rôle de l’inceste en Égypte ancienne.
    • Théias roi d'Assyrie est objet de passion de sa fille qui réussit à coucher avec son père qui ignore avec qui il couche, pendant douze nuits. De cette union naît Adonis. (rapporté par Pseudo-Apollodore 3.14.4) Adonis est aussi considéré fils de Cinyras, le fondateur de la ville de Paphos en Chypre, et Ovide raconte le récit avec lui à la place de Théias. (Les Métamorphoses 10.297)
  • Dans la mythologie de l’Égypte antique, une grande partie des unions divines était incestueuses. Par exemple, dans la grande Ennéade d’Héliopolis, les couples Chou-Tefnout, Geb-Nout, Osiris-Isis et Seth-Nephtys sont tous des couples frère-sœur. Le mythe du frère-époux était très tenace.

Cas d’incestes historiques [modifier]

  • À Rome Clodius Pulcher fut accusé d’inceste avec sa sœur Clodia ;
  • Jean V d'Armagnac épousa sa sœur Isabelle d’Armagnac ;
  • On prête à Ramsès II d’avoir eu des enfants avec au moins deux de ses filles ;
  • Les Ptolémées étaient incestueux et se mariaient entre frères et sœurs ;
  • Cléopatre a épousé successivement ses deux frères cadets pour respecter le testament de son père (qui stipulait que le trône revenait à son fils aîné et sa fille aînée ensemble). Elle les a supprimés pour pouvoir gérer seule le pays.

Œuvres de fiction traitant de l’inceste [modifier]

Bibliographie [modifier]

Voir aussi [modifier]

Liens externes [modifier]



11/08/2007
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