Fritz Lang

Fritz Lang

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Fritz Lang (5 décembre 1890 - 2 août 1976) est un réalisateur allemand d'origine autrichienne, naturalisé américain en 1935, et réalisateur de films célèbres comme M le Maudit, Metropolis, ou la série des Docteur Mabuse.

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Biographie [modifier]

La jeunesse [modifier]

Fritz Lang est né à Vienne (Autriche) le 5 décembre 1890, dans une famille de la grande bourgeoisie. Il est le fils d'un entrepreneur en bâtiment viennois de confession catholique. Sa mère, née Schlesinger, est d'origine juive, convertie au catholicisme. Il est lui-même baptisé dans la religion catholique. Il manifeste des dons pour la peinture et le dessin, et une grande passion pour les récits d'aventures, fables fantastiques, exotiques et policières. Tout cela se retrouvera queslques années plus tard, dans ses films. Cédant à la pression paternelle, il suit des cours d'architecture à Vienne. Mais il est plus attiré par la peinture, et part à Munich.

Il décide de rompre avec sa famille et entame un tour du monde qui va durer, selon ses dires, de 1908 à 1913. Il voyage en Extrême-Orient, en Europe et en Afrique du Nord. À son retour en Europe, il part pour la Belgique où il découvre le cinéma, puis pour Paris, capitale des arts à l'époque, où il gagne difficilement sa vie comme artiste peintre. La déclaration de guerre de 1914 et l'assassinat de Jean Jaurès le poussent à quitter la France. Il s'engage dans l'armée autrichienne puis est hospitalisé à Vienne après avoir été blessé sur le front Est. Il rencontre alors le cinéaste et producteur Joe May auquel il propose des scénarios, mais c'est le producteur Erich Pommer qui le fait entrer dans la compagnie de production allemande Decla (Deutsche Eclair), puis à la société UFA (Universum Film AG) et qui lui permet de réaliser ses premiers films.

Les films muets [modifier]

Après La Métisse (Halbblut, 1919) et Le Maître de l'amour (Der Herr der Liebe, 1919), Fritz Lang réalise Harakiri (1919), d'après Madame Butterfly. La même année, il signe son premier succès, les Araignées (Die Spinnen, 1919-1920), un feuilleton d'aventures en deux parties qui annonce son style à venir : un langage esthétique fondé sur un jeu de prises de vues créant à l'arrière-plan de l'action des motifs géométriques qui ne sont pas sans rappeler certaines peintures abstraites de cette époque, un montage des plans en cadence et un travail sur les éclairages qui offrent des contrastes saisissants. C'est également l'époque où il rencontre Thea von Harbou, sa future femme et scénariste.

Thea von Harbou fut comédienne puis auteur de feuilletons littéraires. Son succès la pousse à devenir scénariste. Elle se marie avec Fritz Lang, et marque la carrière allemande du cinéaste. En 1920, il tourne Das Wandernde Bild et Vier um die Frau ou (Kämpfende Herzen), avant de s'imposer à la critique avec Les Trois Lumières (Der müde Tod, 1921).

L'androïde, « Maria »
L'androïde, « Maria »

Devenu l'un des plus importants cinéastes du pays, Fritz Lang signe une fresque de mystère et d'aventures qui a pour décor la République de Weimar, Docteur Mabuse le joueur (Dr Mabuse, der Spieler, 1922), puis réalise un diptyque sur les grandes légendes germaniques, Les Nibelungen (Die Nibelungen, 1924). Il tourne ensuite un film de science-fiction humaniste, Metropolis (1926). Soutenue par des effets spéciaux spectaculaires et totalement inédits à l'époque, la vision à bien des égards prémonitoire d'une ville futuriste coupée en deux parties distinctes selon le rang social de ses habitants impressionne aujourd'hui encore. C'est sur le tournage de ce film que Lang perd un oeil. Il revient au film de mystère et d'espionnage avec les Espions (Spione, 1928), dont l'esthétique est très volontairement abstraite, puis explore à nouveau la science-fiction avec la Femme sur la Lune (Die Frau im Mond, 1929).

Les films de cette période s'inscrivent dans la mouvance du cinéma expressionniste allemand, notamment le Docteur Mabuse avec l'utilisation de décors peints en couleurs vives (bien que cela ne se voie pas en noir-et-blanc, cela influença sans doute le jeu des acteurs) et représentant des perspectives fortement improbables.

Les films parlants [modifier]

Peter Lorre dans « M »
Peter Lorre dans « M »

Son premier film parlant est M le maudit, (M est le titre original), réalisé en 1931. Le scénario de Fritz Lang et de son épouse Thea von Harbou, spécialiste du feuilleton populaire, se réfère aux meurtres en série caractéristiques de cette époque troublée de l'histoire allemande. Ce sont le « drame du destin » et le thème du Bien et du Mal qui intéressent le cinéaste, auteur d'une réflexion fascinante sur les procédures de jugement : une des scènes les plus fortes du film est en effet le procès du meurtrier, qu'interprète Peter Lorre, par un tribunal constitué par la pègre organisée et dans laquelle certains ont voulu voir une parabole du mouvement nazi. En fait, c'est la pourrissante société Weimar qui est ici dépeinte. Le pays est prit en étau par le nationalisme montant et le chômage, conséquence plus ou moins directe de la crise de 1929. Il est à noter que Fritz Lang utilisa de vrais criminels et délinquants, sortis de prison pour l'occasion. On peut remarquer que pour son premier film parlant, il utilise déjà la bande son comme élément dramatique, avec l'horloge évoquant l'attente et l'inquiétude de la mère d'Elsie Beckman (la première victime), ou encore l'utilisation du Hall de Roi de la Montagne (Peer Gynt d'Edvard Grieg) comme leitmotiv sifflé par l'assassin avant de passer à l'acte.

Contrairement à ce qui a souvent été dit, M le maudit ne s'inspire pas uniquement de l'affaire Peter Kürten (le « vampire de Düsseldorf »). Le premier titre devait être Mörder unter uns (Les assassins sont parmi nous), mais les nazis y virent une critique et finirent par l'interdire quelques années plus tard. Ce film est également le plus grand succès commercial du cinéaste. Noël Simsolo, historien et critique de cinéma, auteur de nombreuses études dont une sur Fritz Lang, rapporte une anecdote intérressante: un jour, alors que Lang se rendait aux studios Staaken pour continuer la mise en scène de son film, un directeur nazi lui refuse l'entrée car le titre du film était encore Les assassins sont parmi nous. Il pensait que Lang faisait un film contre le régime nazi. Ce n'est que lors du tournage que Lang change le titre en M, après avoir réalisé la scène où Peter Lorre se fait inscrire un M à la craie par un délinquant.

Enfin, il faut signaler qu'il s'agit du film préféré de son auteur: «mon film tout entier est un reportage. M est mon préféré», ne cessera-t-il de répéter tout au long de sa vie, dans chaque entretien écrit ou audiovisuel. Il le dit à Brigitte Bardot dans Le Mépris de Jean-Luc Godard, film où il joue son propre rôle à la demande du cinéaste français.

Inquiet de la montée grandissante du nazisme, il tourne une nouvelle aventure de Mabuse, Le Testament du docteur Mabuse (Das Testament des Doctor Mabuse, 1933) et dira plus tard y avoir attaqué indirectement les nazis. Thea von Harbou collabore au scénario. Le personnage du Dr Mabuse renvoie directement au surhomme. Il est souvent interprété comme le portrait d'Adolf Hitler. Mais le 1er de la série des Dr Mabuse ne contient aucun élément allant dans ce sens, fidèle aux Fu Manchu, Fantomas et autres grands criminels comploteurs. Ce n'est qu'avec Le Testament du Dr Mabuse, tourné en 1932 peu avant la prise du pouvoir par Hitler, que Lang a fait un rapprochement qu'il dira plus tard, en 1941, à la sortie de Man Hunt (Chasse à l'homme), son premier film anti-nazi, intentionnel, en faisant répéter par son personnage de malfaiteur séduisant de nombreuses phrases qui sont autant d'appel au crime!

Quand Adolf Hitler arrive au pouvoir, Thea von Harbou rejoint les rangs nazis. Noël Simsolo, dans son étude sur Lang, note que Thea von Harbou injecte dans ses personnages des composantes nationalistes et provoquatrices. Elle inclue des monologues ou des jugements pseudo-philosophique. Bref, l'épouse de Lang est pétrie des idées nationalistes du III Reich. Joseph Goebbels, Ministre de la Propagande, convoque Lang pour lui proposer d'être à la tête du département cinéma de son ministère, donc du cinéma allemand. À cette époque, Lang est le cinéaste le plus populaire de l'Allemagne, et mondialement connu. Selon ses dires, Fritz Lang décline poliment l'offre en précisant que sa mère est juive. Goebbles lui répond: «ce qui est juif, nous en déciderons». Il quitte l'Allemagne quelques heures après cet entretien car il sait très bien qu'un refus aurait des conséquences très graves. Il s'exile à Paris, où il retrouve Erich Pommer pour qui il réalise Liliom (1934). Le 6 juin 1934, il part pour les États-Unis, afin de marcher sur les traces de Friedrich Murnau, Ernst Lubitsch, Josef von Sternberg et Erich Von Stroheim, autres cinéastes allemands et viennois, exilés à Hollywood.

La carrière américaine [modifier]

À Hollywood, Fritz Lang réalise d'abord une trilogie réaliste et sociale, Fury (Fury, 1936), un pamphlet sur le lynchage et la volonté de puissance, J'ai le droit de vivre (You Live Only Once, 1937), une tragédie sur un couple pourchassé par la police inspirée par l'histoire de Bonnie et Clyde et Casier judiciaire (You and Me, 1939), une fantaisie sur l'inutilité du vol, pour laquelle Kurt Weill écrit une musique. Le producteur Darryl Francis Zanuck lui permet de tourner deux westerns où il intègre son thème favori, la vengeance. Il tourne ainsi Le Retour de Frank James (The Return of Frank James, 1940) et Les Pionniers de la Western Union (Western Union, 1941). Il enchaîne ensuite plusieurs œuvres combattant le nazisme comme Chasse à l'homme (Man Hunt, 1941), Les bourreaux meurent aussi! (Hangmen Also Die!, 1943), écrit avec Bertolt Brecht, Espions sur la Tamise (Ministry of Fear, 1944) et Cape et Poignard (Cloak and Dagger, 1945).

Fritz Lang aborde également la psychanalyse dans des films noirs teintés d'onirisme, tels La Femme au portrait (The Woman In The Window, 1944), La Rue rouge (Scarlet Street, 1945), remake de La Chienne de Jean Renoir, le Secret derrière la porte... (The Secret beyond the Door..., 1948), une intrigue à caractère psychanalytique, et House by the River (1950). À l'exception d'un film de guerre, Guérillas (Americain Guerrilla in Philippines, 1950), d'un western romantique avec Marlene Dietrich, l'Ange des maudits (Rancho Notorious, 1952) et d'un film d'aventures, les Contrebandiers de Moonfleet (Moonfleet, 1954), il tourne surtout des mélodrames, des films à suspense et des films noirs : Le démon s'éveille la nuit (Clash By Night, 1952), La Femme au gardénia (The Blue Gardenia, 1953), Règlement de comptes (The Big Heat, 1953), Désirs humains (Human Desire, 1954), d'après la Bête humaine d'Émile Zola, remake du Renoir éponyme, la Cinquième Victime (While The City Sleeps, 1956) et L'Invraisemblable Vérité (Beyond a Reasonable Doubt, 1956).

Dans les Contrebandiers de Moonfleet, Lang tourne en Cinémascope. Cette expérience n'est pas de son goût et le réalisateur va même jusqu'à affirmer que ce procédé « n'est bon qu'à filmer les enterrements ou les serpents ».

Le retour en Allemagne [modifier]

À la fin des années cinquante, Fritz Lang revient en Allemagne pour signer un superbe film d'aventures exotiques en deux parties et en couleurs, le Tigre du Bengale (Der Tiger von Eschnapur, 1959) et le Tombeau hindou (Das indische Grabmal, 1959), puis ressuscite une dernière fois Mabuse pour signer un film sévère, haletant et contestataire sur l'Allemagne contemporaine, le Diabolique docteur Mabuse (Die Tausend Augen von Doktor Mabuse, 1960).

Fritz Lang meurt le 2 août 1976, il repose au cimetière du Forest Lawn Memorial Park des collines d'Hollywood à Los Angeles en Californie.

Filmographie [modifier]

en Allemagne [modifier]

en France [modifier]

aux États-Unis [modifier]

Lang, d'une manière ou d'une autre, participe ou intervient toujours sur les scénarios, même s'il n'est pas crédité.

en République Fédérale d'Allemagne [modifier]

Par ailleurs, Fritz Lang interprète son propre rôle dans Le Mépris de Jean-Luc Godard (1963).

Bibliographie [modifier]

  • 1919 : Les Araignées, Roman de Fritz Lang, paru en France en 2002 aux Editions du Rocher dans la Bibliothèque du Mystère.
  • 1970 : "Fritz Lang" par Luc Moullet - "Cinéma d'aujourd'hui", Editions Seghers
  • 1984 : Fritz Lang par Lotte H. Eisner
  • 1985 : "Fritz Lang" traduit de l'allemand par Claude Porcell (1976 Carl Hanser Verlag München, Wien), "Rivages/Cinéma", Editions Rivages
  • 1990 : Fritz Lang en Amérique entretien avec Peter Bogdanovich (Cahiers du cinéma - Ed.de l'Etoile - Seuil)
  • 1990 : "Fritz Lang, films, textes, références, Georges Sturm, Presses Universitaires de France
  • 1993 : "Fritz Lang, La mise en scène, coordonné par Bernard Eisenschiz et Paolo Bertetto, Cinémathèque Française
  • 1997 : "Fritz Lang, The Nature of the Beast, Patrick McGilligan, St. Martin Press . New York
  • 2001 : "Die Circe, der Pfau und das Halbblut, Die Filme von Fritz Lang, 1916-1921, Georges Sturm, Wissenschaftlicher Verlag Trier / Cinémathèque Municipale de Luxembourg
  • 2001 : "FL", Fritz Lang, Leben und Werk, Bilder und Dokumente, coordonné par Rolf Aurich, Wolfganfg Jacobsen et Cornelius Schnauber, Jovis éditeur pour le Filmmuseum de Berlin, trilingue (allemand, anglais, français)
  • 1929 : Une femme dans la Lune, Thea von Harbou, "Collection du Lecteur", Editions Cosmopolites, Paris
  • 2001 : Docteur Mabuse, Norbert Jacques, Editions du Rocher
  • 2001 : Le testament du docteur Mabuse, Norbert Jacques, Editions du Rocher
  • 2003 : Fritz Lang, le meurtre et la loi. Michel Ciment. Découvertes Gallimard.

Voir aussi [modifier]

Le film "La Rue rouge" (1945) dans sa version originale sur le site d'Internet Archive. (en)

Liens externes [modifier]



28/08/2007
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