Intelligence
Intelligence
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Intelligence vient du latin intellegentia (faculté de comprendre), dérivé du latin intellegere signifiant comprendre, et dont le préfixe inter (entre), et le radical legere (choisir, cueillir) ou ligare (lier) suggèrent essentiellement l'aptitude à relier des éléments qui sans elle resteraient séparés.
Ainsi en est-il de la lecture en tant qu'aptitude à saisir le sens qui unit les mots, les phrases, les paragraphes etc. au delà du simple déchiffrage discontinu des termes inscrits sur un support quel qu'il soit : papier, affiche, mur, écran de téléviseur, de cinéma ou d'ordinateur, etc.
C'est donc la capacité à saisir (et savoir utiliser) des liens entre des éléments disparates, c'est savoir lire au sens le plus large : lire les signes écrits par l'homme (sur le papier ou sur un écran d'ordinateur), mais aussi les signes inscrits dans la nature, voire des signes au-delà de la nature (intelligence métaphysique), qui sont les éléments constitutifs du langage.
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Définition [modifier]
Définir l'intelligence est difficile.
Pour Jean Piaget, l'intelligence dérive de l'adaptation du sujet à son milieu. Il distingue deux types d'intelligence :
- L'intelligence pratique ou sensori-motrice,
- L'intelligence intériorisée (verbale ou réfléchie).
A propos du test Binet-Simon, il serait raisonnable de réduire l'intelligence à des performances de tests, mais ce n'est pas le cas même s'ils sont largement utilisés. Ils visent à quantifier (de façon relative, par rapport à une population « moyenne », et non de façon absolue) la capacité à percevoir, conserver, analyser et utiliser l'information en provenance de son environnement afin d'interagir avec celui-ci.
Il est clair que, selon le domaine, l'intelligence d'un individu est variable. De nombreux autistes, par exemple, restituent dans le plus grand détail des informations visuelles - bien plus fidèlement que des non-autistes. Cependant, la possibilité même de quantifier ce concept si vaste et complexe qu'est l'intelligence est une idée très mitigée. Plusieurs croient que l'on devrait renommer les tests de QI « tests de potentiel académique » (TPA) afin d'être plus précis quant à ce qu'ils mesurent.
En l'absence de définition commune, et d'instrument de mesure satisfaisant, de nombreuses définitions existent, qui se recoupent plus ou moins.
On peut dire que l'intelligence est l'ensemble des fonctions mentales mobilisées pour l'analyse, la compréhension, et l'organisation du réel en pensées (concepts) chez l'être humain, à défaut de connaître celles des autres animaux, notamment les plus évolués.
On peut aussi définir l'intelligence comme étant la capacité à utiliser le raisonnement causal, l'imagination, la prospection et la flexibilité. Elle serait ainsi liée à la faculté d'adaptation, sans s'y réduire.
On peut aussi adopter l'excellente définition qu'en donne le Trésor de la Langue Française informatisé (après avoir consacré un article de 26 pages au concept et au mot) :
[Dans des circonstances nouvelles pour lesquelles l'instinct, l'apprentissage ou l'habitude ne dispose d'aucune solution] Aptitude à appréhender et organiser les données de la situation, à mettre en relation les procédés à employer avec le but à atteindre, à choisir les moyens ou à découvrir les solutions originales qui permettent l'adaptation aux exigences de l'action.
Autres définitions et citations diverses [modifier]
- « L'intelligence, c'est ce que mesurent les tests d'intelligence »
L'inventeurs des test de QI, A. Binet, aurait fait une réponse de ce type (plus précisément : « Mon test d'intelligence mesure l'aptitude... au test »).
- L'intelligence est la capacité de
- réagir avec souplesse aux situations qui se présentent
- tirer profit de circonstances fortuites
- discerner le sens de messages ambigus ou contradictoires
- juger de l'importance relative de différents éléments d'une situation
- trouver des similitudes entre des situations malgré les différences qui peuvent les séparer
- établir des distinctions entre des situations malgré les similitudes qui les rapprochent
- synthétiser de nouveaux concepts à partir d'anciens concepts assemblés différemment
- trouver des idées nouvelles
- Douglas Hofstadter dans "Göedel, Escher, Bach"
- L’intelligence est une capacité de saisir le réel. Le labeur de l’intelligence n’est pas vain. Il permet une pénétration de l’intime de la réalité, selon l’étymologie qu’il donne du mot intelligence : intus-legere. Lire à l’intime de la réalité, c’est-à-dire percer les apparences qui peuvent être trompeuses.
- Fides et ratio, 1999
- Ensemble des fonctions mentales ayant pour objet la connaissance conceptuelle et rationnelle (par opposition à la sensation et à l'intuition). Aptitude à comprendre et à s'adapter facilement à des situations nouvelles.
- Tiré de Terminologie de neuropsychologie et de neurologie du comportement. Recherche et réd. Louise Bérubé, 1991.
- L'intelligence est la capacité à comprendre un contexte nouveau, et à réagir à cette nouvelle situation de façon adaptée.
- Richard Atkinson
- Jean-Charles Terrassier
- L'intelligence, modelée par le patrimoine génétique et par l'environnement culturel et affectif, dépendrait d'un équilibre subtil entre un mode de traitement rapide des informations et un mode lent d'analyse de ces données.
Faculté de connaître, de comprendre et de s'adapter, faculté d'abstraction et d'anticipation ou encore intuition [ ... ]. Pour connaître, pour comprendre et pour s'adapter, en un mot pour faire preuve d'intelligence, il faut que les perceptions et les sensations que reçoit le système nerveux central aient un sens, ? c'est-à-dire que les différents stimulus sensoriels soient associés, classés par les structures cérébrales nécessaires au traitement de l'information et mémorisés. Les étapes de ce traitement, par exemple la rapidité de perception d'un stimulus, son stockage, son évaluation par rapport aux informations déjà enregistrées, son analyse et la réaction qu'il déclenche, sont des facteurs de l'intelligence.
- Tiré de Qu'est-ce que l'intelligence ? Jean-Pol Tassin, dans Pour la Science, n°254, décembre 1998.
- L'intelligence, ça n'est pas ce que l'on sait mais ce que l'on fait quand on ne sait pas.
- Quel truc magique nous rend intelligent ? Le truc, c’est qu’il n’y a pas de truc. La puissance de l’intelligence provient de notre vaste diversité, et non d’un seul principe parfait.
Le test de Turing [modifier]
En l'absence d'une définition satisfaisante pour l'intelligence, il est difficile de décider si une machine (ou un animal) est ou non intelligent.
Alan Turing propose donc de prendre l'homme comme étalon, et de considérer qu'une machine est intelligente si un homme est incapable de distinguer l'objet testé d'un humain testé simultanément. Cf. test de Turing.
Difficulté [modifier]
On admet que l'homme intelligent est souvent celui qui perçoit comme processus unique ce que ses contemporains voient comme phénomènes indépendants.
Ainsi, après les intuitions de Galilée et Descartes, Newton comprit que le jet d'une pierre, la rotation de la Lune et les marées relevaient du même "mécanisme", similitude qui n'était pas évidente. Il percevra aussi comme distincts des phénomènes qui avant lui étaient perçus comme un tout : ainsi masse et poids, ou température et quantité de chaleur, avant que les physiciens ne s'en préoccupent.
Toutefois, il faut bien garder à l'esprit que ce dernier exemple d'intelligence, très caractéristique d'une certaine forme de représentation, est lié à l'héliocentrisme. On a constaté dans l'Histoire ses conséquences sociologiques (voir révolution copernicienne). Les découvertes ultérieures de la physique au XXe siècle (trois autres interactions élémentaires, physique quantique) relativisent cet exemple, tout en le confirmant sur le fond sur le plan des sciences physiques. Cette forme d'intelligence a été poussée à son maximum avec la pensée de Claude Henri de Rouvroy, comte de Saint-Simon (voir aussi philosophie des réseaux), qui pensait que Dieu avait été remplacé par la gravitation universelle.
Un problème est présenté par le fait qu'une personne à l'esprit peu délié considèrera elle aussi comme un phénomène unique ce que ses contemporains voient comme différent, et comme différents ce que ceux-ci voient comme unique. On peut s'en rendre compte en reprenant l'exemple ci-dessus sur Newton dans le contexte actuel, où toutes ces idées sont bien assimilées.
Il ne sera donc pas possible de trancher entre une manifestation d'intelligence et de son absence par autre chose que par l'épreuve du réel. Ce paradoxe a parfois été désigné dans les forums Usenet du groupe fr. sous le nom de Loi de Nadot.
L'intelligence de l'homme [modifier]
Intelligence et agressivité [modifier]
L'intelligence n'a probablement rien à voir avec l'agressivité. De nombreux auteurs ont par le passé essayé de lier les deux, comme ils ont essayé de limiter uniquement l'intelligence à l'humain, de préférence blanc et de sexe mâle. Ces notions tendent à disparaitre dans les recherches actuelles.
Intelligence et physiologie humaine [modifier]
Le développement du cerveau et de l'intelligence de l'Homme a été rendu possible (ou au moins plus facile) par de nombreuses adaptations successives. Toutes ne sont pas nécessaires (le même effet peut être le résultat d'autres adaptations), mais toutes sont un facteur de facilitation. Certaines d'entre elles ont une probabilité accrue lorsque l'homme a déjà progressé sur la voie de l'intelligence, et qu'il a déjà adopté un mode de vie en conséquence.
La station debout, d'abord, semble un facteur essentiel. Elle libère les mains, les débarrasse d'un contact agressif avec le sol et rend possible une sensibilité accrue du toucher. Elle déplace la jonction crâne-colonne vertébrale, ce qui facilite le développement du volume crânien. Sur le plan du comportement, elle permet une action à distance (lancement d'objets, cailloux puis autres armes plus élaborées) particulièrement utile à un animal mal armé, tant pour tenir en respect un prédateur que pour harceler une proie.
L'homme se distingue par la très grande variété d'expressions de son visage, et de sons qu'il peut produire avec sa bouche (et sa capacité d'imitation de sons animaux). Sa face, sa mâchoire et sa bouche sont adaptées en ce sens, cela peut être un facteur important pour le développement de l'abstraction, à partir de l'association entre les sons, les choses, les sentiments et les idées.
L'homme se distingue par un comportement sexuel débridé, sans saisonnalité marquée et dissocié du cycle reproductif de la femme. Il est possible que cette adaptation équilibre l'agressivité humaine.
De même, l'agressivité féminine moindre (ce qui ne veut pas dire absente !), observée dans de nombreuses espèces, a pu être une nécessité, conduisant à des différences sensibles de comportement. Bien que cela soit politiquement incorrect et contestable (notamment en raison d'une définition satisfaisante de l'intelligence), cela peut expliquer des différences d'intelligence (selon le domaine, notamment) entre mâle et femelle humains.
Le jeune enfant est, par rapport aux autres mammifères, un prématuré (néoténie). Cela lui permet une croissance considérable du crâne, qui sinon rendrait sa naissance impossible (on peut imaginer d'autres adaptations ayant le même effet, mais celle-ci fait l'affaire). Cela le rend également à la fois apte à adopter des techniques élaborées dont il ne dispose pas par câblage neuronal d'origine ("instinct"), et dépendant de ces techniques.
Globalement, il apparaît (dans une approche finaliste en premier lieu) que l'Homme est construit pour être intelligent, à la fois sur le plan individuel et sur le plan social.
Dans une approche non finaliste, depuis les progrès de la science en biologie moléculaire, il apparaît que l'homme est un être intelligent car son contexte évolutif a petit à petit sélectionné les individus dont les caractéristiques physiologiques permettaient son développement intellectuel.
Inné et acquis [modifier]
Il est bien évident que l'intelligence est en grande partie un caractère héréditaire (sinon, un chimpanzé ou même un chien éduqué comme un humain devrait avoir l'intelligence d'un humain, ce qui n'est manifestement pas le cas).
Il est non moins évident que l'intelligence est dépendante de l'environnement, tant par les aspects physiques (qualité de l'alimentation par exemple) que par les aspects plus relationnels (contraste entre les enfants privés de soins humains et les autres ; cf. par exemple Kaspar Hauser et les enfants dits « sauvages » ).
Cela n'empêche pas les débats sans fin sur l'importance respectives des deux facteurs, et sur les conclusions à en tirer d'un point de vue politique.
Sir Francis Galton, un cousin de Charles Darwin, proposera par exemple de mettre en place une politique d'amélioration de l'espèce humaine, et inventera le terme eugénisme. Ce point de vue sera même dominant à la fin du XIXe siècle et encore au XXe siècle (mythe de l'Homme Nouveau – Nikola Tesla en sera l’un des nombreux partisans). De nos jours, l’extropianisme et dans une moindre mesure le transhumanisme penchent pour un eugénisme à visage humain.
Plus concrètement dans la vie de tous les jours, les différentes opinions sur la part respective de l'hérédité et de l'éducation ont un impact souvent structurant, quoique sous-jacent, sur les stratégies éducatives. Ainsi et par exemple, si la part inné/héréditaire est importante, il faut prévoir des programmes adaptés au niveau (et au type) d'intelligence des enfants, et mettre en place une politique visant beaucoup à repérer les enfants naturellement intelligents et donc « sélectionner » ; dans ce cas, les qualités propres des enfants s'exprimant fortement, des politiques de mélange auront peu d'effet positifs et beaucoup d'effets négatifs (en soumettant les enfants à un régime intellectuel inadapté, trop riche ou trop pauvre selon le cas). Inversement, si la part éducative est forte, il est inutile de sélectionner mais au contraire il faut stimuler, et on peut prévoir des programmes très homogènes ; en outre, des politiques de « mixité sociale » pourront atténuer les différences initiales d'intelligence entre les enfants sans inconvénient pour eux.
La théorie des intelligences multiples de Gardner [modifier]
Dans Les formes de l'intelligence (1983 traduction française 1997) Howard Gardner, professeur de psychologie cognitive à Harvard a émis l'hypothèse selon laquelle plusieurs types d'intelligence coexistaient chez chaque être humain. En étudiant des individus souffrant de troubles cérébraux, il distingue sept types d'intelligence. Il y ajoute ensuite un huitième, l'intelligence « naturaliste », et en envisage un neuvième, la « spirituelle ». Ces neuf formes de l'intelligence sont :
- L'intelligence logico-mathématique, qui détermine la vitesse à laquelle on peut résoudre un problème numérique ou logique. Surexploitée par les mathématiciens, joueurs d'échecs…
- L'intelligence linguistique (ou verbale), fréquente chez les politiciens, écrivains, poètes grâce à laquelle on peut construire des phrases, avoir le sens de la rime, convaincre et persuader les autres…
- L'intelligence intrapersonnelle, qui désigne la capacité qu'on a à avoir un regard critique sur soi-même, juger de ses limites, comprendre ses réactions…
- L'intelligence interpersonnelle, grâce à laquelle on peut deviner les réactions de son entourage, évaluer les interactions, communiquer… fréquente chez les politiciens.
- L'intelligence visuo-spatiale, qui permet de manipuler des objets tri-dimensionnels dans sa tête. Elle est exploitée notamment par les architectes, géographes, artistes…
- L'intelligence naturaliste, qui permet de classer les objets, et de les différencier en catégories. Très sollicitée chez les zoologistes, botanistes, archéologues...
- L'intelligence musicale, qui juge la hauteur, la tonalité des sons, le rythme et la mélodie d'une musique. Exploitée surtout par les musiciens, compositeurs…
- L'intelligence kinesthésique, qui est responsable de tout ce qui a trait aux travaux gestuels… développée chez les sportifs, mimes, mais aussi ceux qui pratiquent un travail de minutie (chirurgiens, informaticiens…)
- Éventuellement l’intelligence existentialiste ou spirituelle et qui se définit par l’aptitude à se questionner sur le sens ? et l’origine des choses.
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- Une autre définition de l'intelligence multiple a été définie en cinq points l'intelligence logique, sociale, musicale, manuelle et culturelle.
Le point qui distingue les deux définitions d'intelligence ci-dessus est celui de l'intelligence culturelle. L'intelligence culturelle est la fonction qui permet de faire appel à sa culture pour résoudre un problème en transposant l'acquis.
Intelligence et créativité [modifier]
Sur un continuum intelligence pure — intelligence créative — créativité intelligente — créativité pure, il est très difficile de faire la différence entre intelligence et créativité.
Le paradigme des créativités multiples distinguant les formes concrètes de créativité des adultes rend mieux compte aujourd'hui des différentes formes de talents ou d'intelligence que la théorie des intelligences multiples de Gardner.
Voir aussi [modifier]
- Jean Piaget
- le Renseignement et l'Intelligence économique
- Intelligence émotionnelle
- Intelligence collective
- Intelligence artificielle
- Intelligence distribuée
- Théorie des intelligences multiples
- Quotient intellectuel
- Test Binet-Simon
- intelligence animale
- intelligence ambiante
- tête
On nomme également intelligence la capacité à comprendre et anticiper les mouvements d'un allié ou d'un adversaire, ou à communiquer avec lui (vivre en bonne intelligence; intelligence avec l'ennemi...). La langue anglaise nomme de façon générique Intelligence ce qu'on appelle en français renseignement, veille stratégique et parfois espionnage. Le monde économique contemporain utilisant l'anglais comme lingua franca, il a introduit par ce canal le terme Intelligence économique. Voir aussi oxymore.
Bibliographie [modifier]
- L'intelligence de l'enfant. Le regard des psychologues, coordonné par Martine Fournier et Roger Lécuyer