Un jeune enfant exprime sa santé physique ainsi que psychologique par sa croissance, son développement perceptif et sa motricité. C’est par l’éveil de ses sens et l’expression motrice qu’il démontre son intérêt pour l’environnement et qu’il construit la base de tout son développement ultérieur, tant sur les plans physique, psychique, intellectuel, affectif et social. On ne saurait négliger l’importance d’un développement moteur adéquat et tout l’apport motivationnel de l’environnement et des parents.
Le développement de la motricité se fait tout d’abord sous l’influence des sens tactiles et par la maturation qui amène l’enfant à contrôler les différents muscles de son corps et qui le fait passer, en l’espace de quelques années, d’un état de dépendance à un état d’autonomie relative. Une fois acquise la maturité squelettique, nerveuse et musculaire, il est capital que l’enfant ait l’opportunité de s’exercer, de mettre à profit sa curiosité et d’expérimenter ses nouveaux pouvoirs. Il est essentiel aussi qu’il puisse bénéficier de l’encouragement et du support de ses parents dans un climat chaleureux et motivant. Inutile cependant de vouloir bousculer la nature et de précéder les événements ; par exemple, l’entraînement à la propreté est impensable avant que le bébé n’ait atteint la maturité des nerfs et des muscles qui commandent les sphincters (entre 18 mois et 2 ans). Il faut être présent à l’enfant et respecter son rythme sans le forcer à se développer avant qu’il ne soit prêt.
Le premier rôle de la mère et du père consiste à fournir à l’enfant l’apport nutritionnel adéquat par le biais d’aliments vivants, variés et bien apprêtés. Ils doivent en même temps lui procurer un environnement familial serein, respectueux et stimulant tout en surveillant ses progrès. Il convient de souligner que si la majorité des enfants se développent suivant un modèle semblable (selon un ordre particulier et prévisible), chacun s’exprime à travers une individualité particulière que l’on doit respecter et valoriser. Être parent n’est pas toujours un rôle de tout repos. Il est très important d’être soi-même en bonne santé pour supporter patiemment la vitalité souvent bruyante et remuante de l’enfant. D’ailleurs, la toute première condition à la santé du rejeton est le bon état physique et psychique de ses géniteurs pendant et après la grossesse.
Un enfant se développe sur tous les plans à la fois et on ne saurait isoler la motricité de l’affectivité, de l’intelligence et de la socialisation. Toutefois, cette même motricité occupe une place privilégiée pendant les premiers mois et les premières années de la vie et nourrit en quelque sorte les autres grands domaines du développement. Voyons donc ensemble ces incidences du développement moteur sur l’ensemble du développement de l’enfant.
Santé physique
Autant une motricité adéquate est signe de santé physique, autant elle en est aussi une garantie. Un enfant à l’aise dans ses différents mouvements et adéquat dans leur utilisation aime s’utiliser pour jouer, courir, sauter, grimper. Cette dépense d’énergie, rarement une manifestation d’hyperactivité, mais plutôt l’expression de sa vitalité, lui permet d’absorber l’oxygène nécessaire au métabolisme, lui ouvre l’appétit et le prédispose au sommeil. D’où l’importance de faire jouer l’enfant dehors et de lui fournir tous les nutriments dont son corps a besoin. À l’opposé, un enfant maladroit ou, pour toutes sortes de raisons, retardé dans son développement risque d’être passif, retiré, d’avoir un sommeil moins profond et un appétit altéré, toutes des conditions qui renforcent le retard et qui affectent les autres grands secteurs du développement. C’est l’observation éclairée des parents qui permettra d’intervenir adéquatement et fermement si le besoin s’en fait sentir pour éviter que ces retards ne prennent des proportions désastreuses et parfois irréversibles.
Santé émotionnelle
L’activité physique a toujours été un excellent moyen de se libérer des tensions ou frustrations accumulées pendant la journée. C’est un moyen sain de défoulement beaucoup plus approprié que l’agressivité gratuite souvent dirigée à tort contre des personnes ou des objets non concernés. Aussi jeune soit-il, l’enfant vit dans un monde où toute frustration ne peut ni ne doit lui être évitée. C’est à travers l’attente, les difficultés, les épreuves qu’un individu apprend à vivre et à s’élever. Mais quand il peut libérer ses tensions dans ses jeux quotidiens, lorsqu’il se dépense à l’extérieur, il ajoute à l’harmonie de sa vie.
Au contraire, les enfants et adultes contraints de toujours contenir leurs émotions et leurs sentiments trouvent, suivant leur personnalité, des façons malsaines de se libérer de leurs tensions. Ils peuvent les diriger contre eux-mêmes en développant des maladies psychosomatiques ou des problèmes névrotiques, ou les diriger contre autrui en devenant des personnalités agressives, hostiles, asociales ou même antisociales. Pour l’enfant, le jeu au grand air, la course, les grimpades et toute activité physique sont l’occasion de laisser libre cours à son activité émotive interne.
Estime de soi
La motricité harmonieuse est également source d’estime de soi. Quel enfant n’est pas fier de ses prouesses physiques, artistiques ou sportives ? Et quel parent affectueux ne manifeste-t-il pas ses encouragements, son support et sa fierté ? Le bébé ou le jeune enfant sont sensibles à ces démonstrations d’amour qui sont pour lui des incitations à aller plus loin, à se dépasser. Elles lui donnent la certitude qu’il est quelqu’un, qu’il a une valeur pour lui-même. S’estimer soi-même, se faire confiance, bref s’aimer, sont des conditions essentielles à un bon équilibre psychologique.
C’est à travers ses premiers apprentissages qu’un enfant acquiert cette estime de lui-même et qu’il pourra par la suite généraliser à d’autres apprentissages. Par exemple, prenons le cas de l’enfant qui fait son entrée à l’école. Face à l’inconnu que représente l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, l’enfant qui s’estime lui-même abordera cette nouvelle expérience avec sécurité, sans douter de ses capacités. Par contre, l’enfant ayant eu peu de succès dans son développement moteur aura peur et, parce qu’il en est convaincu, prétendra qu’il n’est pas capable. Le doute sur soi entraîne systématiquement l’échec et est souvent une des causes des problèmes d’apprentissage à l’école.
Socialisation
Un bon développement moteur est souvent en relation avec un niveau de socialisation élevé. L’enfant adroit, sûr de lui, sera davantage recherché par les autres et davantage apprécié pour ses capacités. Dans les jeux d’équipe, on aimera mieux l’avoir avec soi que contre soi. L’enfant gauche sera malheureusement la risée des autres et finira possiblement par se retirer peu à peu, préférant les activités plus solitaires ou tout simplement l’inactivité et la passivité.
Autonomie
Enfin, un développement moteur adéquat est un facteur important d’autonomie chez l’enfant. En effet, l’enfant habile de ses pieds et de ses mains a tendance à se débrouiller tout seul et ne demande pas à tout instant l’aide d’un adulte pour s’amuser ou s’occuper. Il se prend en main et a l’occasion de s’expérimenter lui-même avec toute la valorisation qu’il retire de faire tout seul. L’adulte a souvent tendance à trop intervenir lorsque l’enfant entreprend quelque chose de lui-même. Son rôle consiste surtout à observer, à donner à l’enfant les outils dont il a besoin, à veiller à sa sécurité et à le laisser agir et se tromper s’il le faut, puisque même à cet âge on apprend de ses erreurs.
Les familles nombreuses d’autrefois avaient l’avantage que les parents n’avaient littéralement pas le temps de tout surveiller, tout contrôler et d’être aussi omniprésents qu’aujourd’hui dans la vie de l’enfant, ce qui laissait beaucoup de place pour la curiosité, l’esprit d’entreprise, la débrouillardise et une saine liberté. L’attitude idéale et équilibrée se situe probablement au milieu…
Ces quelques réflexions font ressortir les avantages d’un bon développement moteur. Il faut mentionner aussi qu’une grande activité motrice chez l’enfant, aussi saine soit-elle, peut entraîner quelques désagréments. En effet, les risques de frictions avec les pairs ou les parents ne sont pas absents. Un enfant très actif prend plus de risques qu’un enfant passif, augmentant la probabilité de blessures ou de bris divers. L’enfant peut aussi, par excès de confiance, développer la vantardise et rendre problématiques ses relations avec autrui. Mais ce sont des difficultés inhérentes à l’enfance et qui ne doivent pas atténuer l’importance pour le développement global de l’enfant de marcher, courir, grimper, jouer d’un instrument de musique, patiner, danser, jouer au hockey ou au soccer, etc. Toutes ces activités contribuent à développer un corps et un esprit sains, à les entretenir et à exprimer la richesse d’un individu.