Questions sur le suicide
Questions sur le suicide
Le suicide peut-il être d’origine génétique ?
Cette question est régulièrement posée par les participants aux groupes d’entraide et de soutien.
La réponse est clairement « non ».
Le suicide est un « fait social total » (Marcel Mauss) aux multiples entrées : sociales, épidémiologiques, médicales, psychologiques, pédagogiques, culturelles, morales ethnologiques …Aucun de ces domaines ne peut prétendre expliquer le fait suicide à lui tout seul. Pour mieux comprendre le suicide, Jennifer White nous propose un modèle écologique, c’est à dire un cadre d’analyse qui tient compte de ce qui se passe à la fois chez une personne ou un groupe d’individus ainsi que dans leur environnement. Ce cadre d’analyse évoque quatre types de facteurs :
- Les facteurs de protection sont les conditions qui réduisent l’impact des facteurs de risque c’est à dire :
- Les facteurs prédisposant qui tiennent à l’histoire de vie de la personne et à l’ensemble des causes la fragilisant.
- Les facteurs contribuant qui sont les comportements ou les événements qui accentuent le risque existant.
- Les facteurs précipitant qui servent de déclencheur lorsqu’une personne est vulnérable : échecs, humiliations, rejets etc...
Le suicide intervient au terme d’un processus au sein duquel ces facteurs interagissent. C’est pourquoi ce processus peut à tout moment être interrompu.
Si j’avais été là, il ou elle ne l’aurait pas fait, mais « on » me dit qu’il aurait recommencé …
Oui …ou … Non.
Certaines personnes empêchées de passer à l’acte à un moment de la crise n’ont jamais réédité. D’autres ont renouvelé leur geste et l’ont fait aboutir. Ce constat peut être crucifiant pour les parents qui se reprocheront de ne pas avoir été présents au bon moment « Nous n’avons pas fait tout ce que nous pouvions »et génère la plus part du temps une culpabilité destructrice.
Pour collaborer au processus de deuil il est important de faire face à la réalité : « Oui, en effet si j’avais été présent, ou, j’aurais pu être présent ce jour-là » et d’accepter que l’amour puisse être impuissance ; accepter ses limites et celles de la situation passée.
C’était son choix, je le respecte
Si le suicide est la seule solution pour en finir avec la souffrance vécue par la personne, peut-on dire qu’il procède d’un choix ? Le choix suppose une alternative.
Courage ou lâcheté
Les jugements de valeur n’ont pas leur place dans le regard porté sur le suicide. C’est une histoire de souffrance, de désespoir, d’impuissance à vivre plus longtemps un état de souffrance personnelle. Au début de la crise suicidaire, la personne est en recherche de solutions pour « s’en sortir ». C’est l’absence de toute réponse à cette souffrance qui la conduit à envisager des scénarios suicidaires (scénarios de résolution de crise), puis à les ruminer jusqu’au passage à l’acte.
Acte impulsif ou acte prémédité
Au terme du processus suicidaire, la personne est prête à passer à l’acte.
- Il se peut qu’elle en soit empêchée et ne recommence jamais.
- Il se peut aussi que l’acte n’aboutisse pas et n’aie jamais de suites.
*Il se peut encore que la personne suicidaire n’ait pas anticipé de passer à l’acte ce jour-là et soit victime de ce que l’on appelle le « raptus suicidaire » ou « l’instant psychotique » ; moment précis où, passant à l’acte, elle ne s’appartient plus et agit comme en dehors d’elle-même. - Enfin, la personne peut avoir déterminé le moment et le lieu, être sur déterminée, maintenant soulagée de son angoisse : elle est certaine de sa solution et maîtrise les moyens de mise en œuvre.
Elle pourra apparaître étonnamment sereine aux yeux de ses proches lorsqu’ils se remémoreront la période précédant le passage à l’acte.
Faire le deuil de son proche
On ne fait pas le deuil d’une personne mais celui de la relation à cette personne. L’expression « faire le deuil de quelqu’un » équivaut à l’idée d’oublier la personne et c’est insupportable. En revanche, faire le deuil de la relation signifie que l’endeuillé-e s’engage dans un processus au cours duquel la relation avec l’aimé-e se transformera. C’est l’enjeu du travail de deuil, transformer la relation et donner mentalement une autre place à la personne physiquement disparue.