Bruno Étain : « Trouble bipolaire, le risque génétique se confirme »

 

 

Bruno Étain : « Trouble bipolaire, le risque génétique se confirme »

Une vingtaine de marqueurs génétiques liés au trouble bipolaire viennent d'être identifiés par une étude américaine portant sur le génome entier. Leur présence conjointe chez une personne multiplierait par quatre le risque de développer cette pathologie mentale, qui affecte au moins 1 % de la population adulte [1].

Qu'apporte ce travail dans la compréhension du trouble bipolaire ? 

Bruno Étain :    Cette étude confirme que la maniaco-dépression est bien une maladie polygénique et offre une carte, inédite par sa taille, des gènes liés à la maladie. Pour cela, 550 000 variations nucléotidiques simples répertoriées dans tout le génome humain ont été comparées entre des centaines de personnes atteintes d'une forme sévère de trouble bipolaire et des témoins. C'est désormais possible avec des puces à ADN - dont les sondes couvrent tout le génome - et le traitement informatique des millions de données recueillies. Une vingtaine de ces variations ont été retrouvées un peu plus souvent chez les personnes atteintes : elles sont localisées dans une quinzaine de gènes susceptibles d'intervenir, de près ou de loin, dans la maladie. 

De quel type de gène s'agit-il ? 

Le gène d'une enzyme - la diacylglycérol kinase eta - est le plus fortement associé à la maladie. C'est intéressant car cette enzyme intervient dans le métabolisme du phosphatidyl inositol, un lipide membranaire. Or celui-ci serait une cible du lithium, le traitement classique du trouble bipolaire. Une autre enzyme identifiée était déjà connue pour agir dans le rythme circadien des mouches. Or le trouble bipolaire se caractérise également par des perturbations du rythme veille/sommeil. Loin d'être le fruit du hasard, ces associations désignent certains éléments des systèmes protéiques et des mécanismes cérébraux probablement impliqués dans la maladie.

Peut-on parler de marqueurs de 

risque génétique ? 

Seulement si ces résultats se confirment. Le risque ne sera pas associé à un seul mais à un groupe de marqueurs. Leur valeur prédictive restera limitée car le trouble bipolaire, même sévère, n'est pas que génétique, des facteurs environnementaux y contribuent aussi. Pour mieux cerner la composante génétique, nous avons lancé en collaboration avec le Centre national du génotypage à Évry une étude du même type sur des patients qui présentent, outre des antécédents familiaux, une forme précoce de la maladie.

Par Propos recueillis par Pierre Kaldy


22/04/2013
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