Des gênes et des thérapies pour stabiliser les bipolaires et les cyclothymiques

 

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Des gênes et des thérapies pour stabiliser les bipolaires et les cyclothymiques

7/02/2012
Auteur : Melle Majdalani

Bipo / Cyclo > Bipolarité adulte > Rythmes

La thérapie interpersonnelle et des rythmes sociaux participe à la stabilisation de la bipolarité et de la cyclothymie.
Les études confirment l’importance et l’efficacité d’une thérapie basée sur la régularité de la routine ainsi que sur les relations interpersonnelles dans le trouble bipolaire notamment de type I (en combinaison avec la pharmacologie) mais également de type II (même en monothérapie). Les recherches actuelles sont très favorables à l’étiologie génétique de la sensibilité du système circadien et de son incidence patente sur l’humeur.

L’hypothèse d’Ellen Frank proposée aux personnes présentant un trouble bipolaire de type II, notamment dans la définition qu’elle propose, pourrait être appliquée à la cyclothymique comme détaillée dans la dernière partie.

Le gène « RORB» responsable du dysfonctionnement du rythme circadien


Des gènes régulant les rythmes circadiens (rythmes dʼenviron 24 heures) seraient impliqués dans la physiopathologie du trouble bipolaire chez les enfants, selon Niculescu. « Le trouble bipolaire est souvent caractérisé par des anomalies du rythme circadien, et ceci est particulièrement vrai chez les enfants ».

Une diminution du sommeil a été identifié comme lʼun des symptômes précoces permettant de distinguer le trouble bipolaire du trouble déficit dʼattention et hyperactivité (TDAH).

L’étude des gènes RORA et RORB chez 152 enfants ayant reçu un diagnostic de trouble bipolaire, a révélé la présence de quatre altérations du gène RORB liées avec le trouble BP précoce.
Le gène RORB est surtout exprimé dans lʼoeil, la glande pinéale et le cerveau. Son expression varie en fonction du rythme circadien dans certains tissus, sachant que des souris dépourvues de ce gène montrent des anomalies de ce rythme.

Le gène « Clock » responsable de manie


Les épisodes de manie dans le trouble bipolaire peuvent être liés à une mutation dʼun gène contrôlant lʼhorloge biologique, selon une recherche effectuée par Colleen McClung à lʼuniversité du Texas à Dallas.

Il a étudié chez des souris le gène Clock lié au rythme circadien (ce quʼon désigne par le terme horloge biologique) qui affecte le sommeil, lʼactivité, les hormones et lʼappétit.

Des souris dont le gène était modifié ont ainsi été comparées à des souris avec un gène normal. Les souris dont le gène était modifié manifestaient un comportement maniaque. Ces souris étaient hyperactives, moins anxieuses et moins déprimées. Par exemple, elles étaient moins craintives lorsquʼelles étaient placées dans un espace ouvert. Elles dormaient moins et montraient une plus grande activité du cerveau en réponse à lʼeau sucrée, la cocaïne et une légère stimulation électrique du cerveau.
Finalement, lorsque les chercheurs ajoutaient du lithium à leur eau, ces souris abandonnaient leur comportement maniaque et commençaient à agir comme les souris ayant un gène normal.

Rythme circadien (Horloge biologique) sensible, importance de la régularité : Pour une psychothérapie basée sur le rythme


Le trouble bipolaire est caractérisé par une perturbation de lʼhorloge biologique (qui régule les cycles de veille et sommeil), une horloge fragile qui doit être soigneusement protégée, selon Ellen Frank. Le sommeil doit être particulièrement soigné car il a un grand impact sur la maladie : on récupère plus difficilement et plus lentement d’un changement dans la routine ou d’un manque de sommeil quand on est bipolaire que quand on ne l’est pas.


Une psychothérapie centrée sur les changements dans le mode de vie pour régulariser son horaire peut soulager les symptômes du trouble (Ellen Frank). Plusieurs recherches avaient déjà montré que les perturbations dans les routines quotidiennes pouvaient rendre plus susceptibles de vivre de nouveaux épisodes (de manie/hypomanie ou de dépression). Les recherches actuelles montrent quʼaider les gens à atteindre et maintenir des rythmes sociaux, incluant un horaire de sommeil régulier et une activité physique adéquate, prévient les rechutes thymiques.


Les personnes atteintes de trouble bipolaire (BPI, BPII et Cyclothymie) qui bénéficient dʼune psychothérapie qui les aide à maintenir une routine quotidienne régulière et à composer avec le stress, préviennent mieux les rechutes.

Dans la "thérapie interpersonnelle et du rythme social", on utilise un outil pour enregistrer et contrôler la régularité des activités quotidiennes (repas, activité physique et sommeil).
Cette psychothérapie consiste à aider à comprendre comment les changements dans les routines quotidiennes et la qualité des relations et des rôles sociaux (comme parent ou conjoint par exemple) affectent l’humeur. Après avoir identifié les situations qui peuvent déclencher des épisodes thymiques, les sujets apprennent à mieux composer avec les événements stressants et à maintenir des relations plus positives. Ces apprentissages sont au trouble bipolaire ce que lʼapprentissage dʼune alimentation différente est au diabète.


La thérapie des rythmes sociaux appliquée à la cyclothymie


L’instabilité, un élément fondamental dans la bipolarité.
Selon Goodwin & Jamison, le modèle de l’instabilité est fondamental dans les troubles bipolaires ; il l’est encore plus dans le cadre de la cyclothymie, qui est un tempérament dans ses fondements instables émotionnellement et qui confinent avec l’âge et les évènements de vie au trouble qui est loin d’être une bipolarité atténuée mais une forme à risque très importante, handicapante et débilitante, responsables de plusieurs parcours de vie chaotique, avortés et sources d’une grande souffrance.
Les différentes composantes et difficultés de la thérapie basée sur les rythmes sociaux et interpersonnelles telles que proposées par le Dr Franck appliquées à la cyclothymie
  • Explication de l’importance de la régularité des rythmes sociaux :
    Les cyclothymiques ont souvent des rythmes décalés (sommeil, repas etc.), très instables et eux aussi sont souvent réticents aux changements et à la mise en place d’un rythme plus stable. Eux aussi ont du mal à reconnaître le lien entre les couchers réguliers et les réveils fixes et leur incidence directe sur l’humeur ainsi que le lien entre l’hypomanie et la dépression. En effet, ils voient souvent dans l’hypomanie (notamment dans sa version soleil) le moyen de rattraper le retard accumulé lors de phases dépressives.
    D’où l’importance de la psychoéducation.

  • Apprendre à régler le niveau de stimulation en fonction des états thymiques (quelque soient leurs durées)
    Vu les variations quotidiennes ou plus espacées dans le temps, il leur est également important d’augmenter le niveau de stimulation quand l’humeur baisse ou lors de périodes favorables à la dépression ou hypomanie et de le baisser en période d’hyperactivité. Les cyclothymiques connaissent également un fonctionnement dichotomique (noir ou blanc) et apprennent des comportements plus nuancés. Entre « tout faire » et « ne rien faire », il existe plusieurs alternatives à adapter aux moments et aux situations en cours. Une grande partie de la thérapie consiste à apprendre à naviguer dans des eaux intermédiaires.

  • Difficulté à identifier et catégoriser les états affectifs
    Les patients pensent souvent que les variations d’humeur sont très aléatoires. Ils apprennent donc à reconnaître les différents types de situations capables d’altérer leur humeur ainsi que les signes pathognomoniques de dépression, d ‘hypomanie et d’état mixte.
    Dans la cyclothymie également, il est important d’apprendre à prendre conscience (comme le précise le Pr Koukopoulos) des changements de niveaux d’énergie

  • Problèmes interpersonnels liés aux idées de grandeur et la prétention
    En dehors des phases hypomaniaques/maniaques, il est trouvé souvent dans les schémas des cyclothymiques :
    Les patients sont souvent grandioses autant dans leurs plaintes, leurs symptômes, leurs souffrances que dans la surestimation de soi (de manière souvent camouflée) ; ce qui peut engendrer de la colère dans l’entourage pouvant mener à des ruptures dans les relations interpersonnelles (notamment affectives) et à de grands conflits et difficultés au travail. Ce schéma est également plus facilement abordable dans le cadre d’une relation thérapeutique solide et suffisamment longue.

  • Problèmes liés à la régulation de l’affect :

    1) En raison souvent de la cyclicité rapide de l’humeur, mais aussi de l’intensité et de l’hyperéactivité, on retrouve chez les cyclothymiques instables et changeants de grandes difficultés de gestion émotionnelle. Nous sommes étonnés que le Dr Frank parlent de cette instabilité chez les BPII ? Il serait intéressant de réévaluer sa population à travers le questionnaire de cyclothymie

    2) Non acceptation et non reconnaissance des états hypomaniaques,

    3) Difficulté à distinguer les épisodes distincts (notamment mixte) de leurs déclencheurs

    4) Les patients ne sont pas capables de souvenir de leur dépression lorsqu’ils sont euthymiques ou hypomaniaques et vice versa

    5) Les patients tentent de régulariser leur humeur par l’abus de drogues, y compris les substances comme le café, l’alcool et le cannabis

Références


  • Frank E., Kupfer DJ., Thase ME., Mallainger AG., Swartz HA., Fagiolini AM., Grochocinski V., Houck P., Scott J., Thompson W., Monk T. (2005), Two-year outcomes for interpersonal and social rythm therapy in individual with bipolar I disorder, Archives of General Psychiatry, 62(9) : 996-1004

  • Frank E., Swart H., Boland E. (2007), Interpersonnal and Social Rhythm Therapy : an intervention addressing rhythm dysregulation in bipolar disorder, Dialogues in Clinical neuroscience, vol.9, No. 3

  • Holly A., Swart H., Frank E. (2008), Psychothérapie interpersonnelle et des rythmes sociaux dans le trouble bipolaire II : structure du traitement et exemples cliniques, Santé mentale au Québec, vol.33, No. 2, p.151-184

  • McClung C. (2007), Circadian Genes, Rythm and Biology of Mood Disorder, Pharmacol Ther., 114(2) :222-32

  • McGrath CL., Glatt SJ., Sklar P., Le-Niculescu H., Kuczenki R., Doyle AE., Biederman J., Mick E., Faraone SV., Niculescu AB., Tsuang MT. (2009), Evidence for genetic association of RORB with bipolar disorder, BMC Psychiatry, 12;9:70


10/05/2013
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