Le rêve éveillé
Le rêve éveillé
Notre imagination construit des scénarios symboliques qui pointent nos blocages et nous aident à les résoudre. Sans dormir.
La méthode
Comptez-vous les moutons avant de dormir ? Si vous n’avez pas pris cette habitude, sachez que cet animal s’introduit quand même, à votre insu, dans 6 % de vos rêves ! C’est le résultat statistique obtenu par Georges Romey qui, vingt années durant, a décrypté plus de six mille rêves et référencé quelque cinq cents symboles. Le troisième tome de son Dictionnaire de la symbolique est disponible chez Albin Michel.
Georges Romey n’est pas seulement un onirologue averti : thérapeute, il a mis au point sa propre méthode, le rêve éveillé libre.
Objectif : résoudre les blocages psychologiques et déclencher un processus de transformation psychique grâce aux symboles des rêves. Rien à voir avec les démarches conventionnelles – freudiennes ou jungiennes – de l’analyse des songes de nos nuits : ici, on rêve "en direct", et sans dormir !
« La première fois, j’ai été stupéfait, raconte Alexandre, conseiller en informatique. Après un temps de relaxation, le thérapeute m’a demandé de décrire la première image qui me venait à l’esprit. C’était un cheval. Peu à peu, j’ai assisté au déroulement d’un véritable film. Jamais je n’aurais cru que notre imagination puisse nous faire voir des images si précises… »
Historique
Né en 1890 à Besançon, Robert Desoille est marqué, très jeune, par deux événements qui vont ancrer en lui une passion pour les mystères de l’esprit humain : à 7 ans, il assiste à une séance d’hypnose ; à 12 ans, il a une expérience de transmission de pensée avec une fillette de son âge. Après des études d’ingénieur, il s’intéresse aux recherches en psychologie et en parapsychologie sur le développement des facultés supranormales.
C’est au cours d’expériences de télépathie qu’il découvre la possibilité de laisser apparaître spontanément, en état de relaxation, des images mentales. A partir des années 20, il ne se consacre plus qu’à la psychologie et crée le "rêve éveillé dirigé". A l’origine, ce n’est pas une technique thérapeutique, mais un processus de développement des potentialités intérieures. Petit à petit, Desoille affine sa théorie et met l’accent sur la collaboration entre patient et thérapeute. Ainsi, très directif, il imposait d’abord un thème qu’il estimait judicieux d’explorer (un serpent, un château, une sorcière…).
Puis, il intervenait sans cesse en demandant, par exemple, de partir à la recherche du château de la sorcière. Souvent, il proposait une ascension ou une descente, car il avait remarqué que, dans un rêve, le mouvement vertical produisait des effets caractéristiques : la montée manifeste une dynamique de sublimation, tandis que la descente permet de rencontrer des images dérangeantes et d’aller à l’origine de ses angoisses.
De plus, il proposait souvent de remplacer des images négatives par des images positives (des images de substitution) pour déclencher le processus de transformation. A partir des années 70, Georges Romey, élève de Desoille, a abandonné cette méthodologie pour laisser le patient s’exprimer. D’où l’appellation "rêve éveillé libre".
« Avec l’expérience, j’ai constaté que la non-directivité donnait des résultats beaucoup plus précis et spectaculaires que le rêve dirigé, précise-t-il. En fait, on trouve toujours ce dont on a besoin au moment où on en a besoin, et cela se passe toujours dans un sens évolutif. »
La grammaire de nos songes
De ces scénarios qui semblent se construire spontanément, patient et thérapeute analysent les symboles les plus importants. Mais pas seulement. En effet, pour Georges Romey, le langage de nos songes n’est pas un vocabulaire dont chaque image, prise séparément, aurait une signification unique, il est surtout une véritable grammaire. Première différence avec l’analyse traditionnelle des rêves.
Un exemple : le "rêve" d’Aline, dans lequel elle a vu trois objets – une bicyclette, une chouette et des lunettes. Le rapport entre ces trois mots ? Pas le sens, mais la forme : deux cercles pour les yeux de la chouette, pour la monture des lunettes et pour les roues du vélo… C’est cette chaîne d’images, « chefs-d’œuvre que l’inconscient se plaît à composer », dit Romey, qui constitue la "grammaire" de nos rêves. « Un symbole n’a pas de vie propre et ce n’est pas parce qu’il a une valeur universelle qu’il a une signification unique. Il n’est qu’un support, un révélateur qui s’offre à nos projections, à partir du moment où il peut jouer un rôle dans notre dynamique psychologique. »