Quels symptômes maniaques évoquent-ils le diagnostic de Bipolarité Juvénile ?

 

Quels symptômes maniaques évoquent-ils le diagnostic de Bipolarité Juvénile ?

Depuis le milieu des années 1990, les troubles bipolaires juvéniles (BPJ) ont reçu une attention accrue à la fois dans la presse populaire et des revues universitaires. Ainsi la fréquence de diagnostic des troubles BP chez les enfants et les adolescents a augmenté de manière assez importante.
Toutefois, rappelons que ce diagnostic a été longtemps négligé voir même ignoré en pédopsychiatrie. Malgré cet intérêt récent, les troubles BPJ restent difficiles à diagnostiquer, car les systèmes aidant au diagnostic ne sont pas du tout adaptés et la BPJ n’est pas identique à la BP adulte.

Un travail récent a été réalisé par l’équipe de l’Université de Columbia à New York. L’équipe de Galanter et al ont interrogé des pédopsychiatres pour avoir une idée sur leur façon de reconnaître les troubles BPJ.

Ainsi 100 pédopsychiatres ont été approchés par mail puis téléphone. Ils sont été sélectionnés au hasard à partir de cinq régions majeures de l’organisation professionnelle des pédopsychiatres américains. 53% des spécialistes contactés ont accepté de participer.
L’étude a consisté de demander aux spécialistes de désigner 10 symptômes indicatifs de la BPJ. Par la suite, des analyses descriptives ont été conduites pour :

1) connaître la manière dont les symptômes de la BPJ étaient classés,
2) vérifier la conformité avec les critères du DSM-IV-TR (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, 4th Edition, Text Revision)
3) mettre en évidence des modèles cliniques alternatifs servant de guide pour le diagnostic de BPJ

Les pédopsychiatres ont considéré comme symptômes les plus évocateurs de BPJ :

  • la labilité,
  • les idées de grandeur,
  • les antécédents familiaux de bipolarité,
  • les éléments psychotiques,
  • les conduites agressives
  • et l’humeur exaltée ou euphorique.

A noter que 4 items de 6 ne sont pas inclus dans les critères du DSM-IV-TR.
Seulement 39,6% des spécialistes ont signalé des symptômes suffisants pour répondre aux critères du DSM-IV-TR, ce qui correspond au statut « DSM positif ». Ce statut s’avère être associé à la région des participants (9% seulement des pédopsychiatres de New York versus 45% des autres régions font référence au DSM), au fait d’avoir une moindre expertise (<10 ans de pratique en pédopsychiatrie), et enfin à un niveau plus faible de confiance en leurs propres capacités à reconnaître la BPJ.

La méthode de reconnaissance clinique de la BPJ varie selon les pédopsychiatres dont la majorité utilise un mélange de symptômes reconnus dans le DSM-IV-TR et d’autres non inclus dans celui-ci. La référence en pratique au DSM-IV-TR semble dépendre des niveaux faibles d’expertise et de confiance en soi.

D'autres études sont requises pour mieux comprendre et améliorer les décisions diagnostiques des pédopsychiatres face à la BPJ. Dans ce contexte, nous citons des travaux des experts de la BPJ, comme Danner et al (2009). Ils recommandent de :

  • Examiner l'impact du niveau de développement de l'enfant sur la présentation clinique des manifestations bipolaires (par exemple, la prévalence des comportements normatifs, les restrictions environnementales exercées sur le comportement des jeunes, le passage en puberté, l'irritabilité, la durée des symptômes…)

  • Explorer les facteurs susceptibles de peser sur l'évolution et l’altération du fonctionnement (par exemple, les fonctions neurocognitives, les handicaps futures…)

  • Evaluer les cas sub-cliniques qui ne répondent pas aux critères complets du DSM-IV-TR

  • Prendre des décisions à partir des bilans et des évaluations appropriés permettant de différencier la BPJ des maladies psychiatriques ou somatiques, des effets potentiels des médicaments ou de la consommation de drogues, qui pourraient mieux expliquer les symptômes bipolaires

  • Repérer les troubles concomitants (notamment le TDAH)

  • Avoir les « bons » informateurs

  • Utiliser les mesures d'évaluation (échelles, questionnaires, modèles d’entretien clinique…).

Ces points seront détaillés dans des posts à venir
Le CTAH reste en contact avec les experts comme Eric Youngstrom, un des responsables de la task force DSM-V pour la BPJ et tente de donner sur ce site des idées sur l’avancement des idées dans ce domaine.

Dr Elie Hantouche.

 

 


EN SAVOIR PLUS ?

Attention, encore à l'heure actuelle, des crises maniaques sont confondues avec de la schizophrénie.

Chez un enfant une phase dure peu et les phases successives peuvent s'enchaîner en quelques heures.

Attention
à ne pas confondre un UP avec de l'hyperactivité pure.
Un enfant cyclothymique a des variations d'énergies liées aux humeurs.

Liens :

CTAH : "L'hypomanie chez les jeunes" - Dr Hantouche
CTAH : L"hypomanie et hyperactivité chez les jeunes

Bibliographie :

Cyclothymie. Trouble bipolaire des enfants et adolescents au quotidien
Dr Elie Hantouche, Barbara Houyvet, Caline Majdalani - Ed JLyon

Sources :

  • " Galanter CA et al. J Child Adolesc Psychopharmacol. 2009 Dec, 19 (6) :641-7.
  • Danner S et al. Clin Child Fam Psychol Rev 2009 Sep; 12 (3) :271-93.


10/05/2013
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