Comportement érotique général (partie 1)

 

 

 

Comportement érotique général (partie 1)

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Chez les hominidés (l'homme, le chimpanzé, le bonobo, l'orang outan) et le dauphin, le comportement sexuel ne serait plus seulement un comportement de reproduction, mais deviendrait également un comportement érotique[1]. Au cours de l'évolution, l'importance et l'influence des hormones[2],[3] et des phéromones[4],[5] sur le comportement sexuel aurait diminué. Au contraire, l'importance des récompenses / renforcements serait devenue majeure[6]. Chez l'être humain, le but du comportement sexuel ne se limite plus au seul coït vaginal, mais s'étend à la recherche du plaisir érotique. Ce plaisir intense est procuré par la stimulation du corps et des zones érogènes, et en particulier par la stimulation du pénis, du clitoris et du vagin. Ce comportement, dont l'orgasme est le point d'orgue, serait un comportement érotique[1]. Selon certains, la reproduction, chez l'être humain, serait même maintenant une conséquence indirecte de la recherche du plaisir[7],[8].

L'opposition, entre le modèle instinctuel et hormonal du « comportement de reproduction »[1] et le modèle hédonique et culturel du « comportement érotique »[1] appris et réalisé pour obtenir du plaisir, n'est pas nouvelle. Mais ce n'est qu'aux alentours des années 2000 que des recherches en éthologie, en ethnologie et en neurosciences ont apporté des données précises permettant d'étayer les deux modèles.

Quand la fonction sexuelle est laissée au repos pendant de longs mois ou plusieurs années, elle se remet en route tranquillement. Cette période de transition n'a rien d'anormal. Chez l'homme, cela se manifeste par une érection plus difficile durant les premiers mois. Chez la femme, il existe une lubrification plus lente, un désir moins puissant.

Sommaire

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Limites du modèle du « comportement de reproduction »[modifier]

Dès les origines de la science moderne, à la fin du XIXe siècle, les principaux chercheurs, médecins ou sexologues ont supposé l'existence d'un instinct de la reproduction. Le seul comportement sexuel « naturel » était donc le coït vaginal, qui permet la fécondation, et tous les autres comportements (masturbation, sodomie, homosexualité...) ne pouvaient qu'être une déviation de l'instinct ou une pathologie.

Les recherches menées en neurosciences à la fin du XXe siècle ont confirmé, chez les mammifères les plus simples, l'existence de structures innées qui orientent le comportement vers la copulation hétérosexuelle[réf. nécessaire]. Mais il ne s'agit pas d'un instinct, car des apprentissages cruciaux sont nécessaires. De surcroît, ces apprentissages sont influencés par les caractéristiques de l'environnement et les hormones n'ont pas un contrôle total du comportement, ce qui explique, déjà chez les mammifères inférieurs, l'existence d'activités sexuelles sans rapport avec la reproduction.

Néanmoins, globalement, il s'agit d'un comportement de reproduction, car la structure du système nerveux est organisée pour la copulation hétérosexuelle.

Article détaillé : Comportement de reproduction.

Au XXe siècle, les études sur la sexualité des primates, en éthologie, ainsi que chez l'être humain en ethnologie, en histoire et plus récemment en neurosciences, ont accumulé des données peu compatibles avec l'existence d'un instinct de la reproduction chez les hominidés.

Les dauphins ont aussi des activités sexuelles très diversifiées[9].

En synthèse, si chez les primates, le « comportement de reproduction » est unique, alors comment peut-on expliquer[7] :

  • D'une part, toutes les activités sexuelles qui ne permettent pas la reproduction, observées tant chez les hominidésque chez l'être humain :
    • Les activités homosexuelles (avec quelques cas d'homosexualité presque exclusive chez les chimpanzés, les gorilles, les langurs, les macaques, les dauphins[9]...)
    • La masturbation (bonobos, orang outans, gibbons, siamangs, langurs et dauphins[9])
    • La masturbation réciproque (bonobos, chimpanzés et dauphins[9])
    • Le baiser (qui n'a aucun rapport avec les organes génitaux, observé chez les bonobos[9])
    • La fellation (bonobos, chimpanzés, macaques et les dauphins)[9]
    • le cunnilingus (chimpanzés, gibbons[9])
    • la sodomie (orang outan[9])
    • Les activités sexuelles prépubères (alors que l'appareil reproducteur est immature, observées chez les bonobos, les chimpanzés, les gorilles, les gibbons, les siamangs, les macaques et les dauphins[9])
    • L'utilisation d'objets (bonobos[9])
    • Les caresses sensuelles
    • Des activités telles que le frottement de la vulve contre une autre vulve, fréquent chez des femelles bonobos et les diverses activités non reproductives des dauphins[9])
    • Et les activités sexuelles entre espèces différentes (occasionnellement observées chez : bonobos, chimpanzés ou macaques, mais plus fréquentes en captivité[9] ou chez les animaux domestiques[note 1])
  • D'autre part, toutes les activités sexuelles pouvant aboutir à une fécondation, mais particulières :
    • Les préférences pour certains partenaires[9] (car cela réduit le nombre de partenaires fécondables) ;
    • Les activités bisexuelles, fréquentes chez les hominidés[10] :
      • bonobos, activités hétérosexuelles 50 à 60 %, donc homosexuelles 50 à 40 %[9] ;
      • chimpanzés, activités hétérosexuelles à 70 %[9] ;
      • gorilles, hétérosexuelles à 80 %[9] ;
      • orang outan, hétérosexuelles à 80 %, mais 80 % homo quand jeune[9] ;
      • gibbons, hétérosexuelles de 50 à 80 %[9] ;
      • langurs, hétérosexuelles à 70 %[9] ;
      • macaques, hétérosexuelles à 70 %[9] ;
      • dauphins, hétérosexuelles de 50 à 70 %[9] ;
      • orques[9]
    • La sexualité de groupe (bonobos, chimpanzés[9])
    • Et les orgies[11] (où le sexe se combine aux aliments, chants, danses et à l'ivresse), habituelles dans l'Antiquité grecque et romaine[12].

À un niveau plus théorique, plusieurs questions nécessitent des réponses précises, en particulier chez l'être humain :

  • Quel est le rôle et l'importance des récompenses / renforcements sexuels [6]?
  • À quoi correspond le plaisir sexuel et quelle est sa fonction ?
  • Quelle est la différence entre le plaisir corporel agréable provoqué par une caresse (sur le dos par exemple) et le plaisir érotique provoqué par la stimulation d'une zone érogène ?
  • Pour quelles raisons la recherche du plaisir corporel agréable n'est pas considérée comme liée à l'orientation sexuelle, alors que la recherche du plaisir érotique est considérée comme indissociable d'une orientation homosexuelle ou hétérosexuelle ?
  • S'il existe un instinct de la reproduction, comment expliquer qu'un circuit cérébral, spécialisé pour contrôler la copulation hétérosexuelle, puisse permettre des activités inter-espèces
  • S'il existe un instinct de la reproduction, qui contrôle les activités sexuelles vers l'hétérosexualité et le coït vaginal, alors pour quelles raisons existe-t-il en Occident une forte valorisation du couple hétérosexuel et une forte homophobie ? Pour quelles raisons est-il nécessaire d'avoir des contraintes culturelles si l'être humain est « naturellement » monogame et hétérosexuel ?
  • S'il existe un instinct, où se trouve-t-il dans le cerveau ? Comment est-il organisé dans le système nerveux ?
  • Si la testostérone est l'hormone du comportement sexuel, comment agit-elle sur les activités motrices ? Comment la testostérone provoque-t-elle par exemple le baiser, la fellation ou le coït vaginal ? Sur quels centres moteurs (médullaires, mésencéphaliques…) agit-elle pour provoquer et contrôler l'anulingus ?
  • À quoi correspond l'amour et quelle est sa fonction ?
  • À quoi correspond l'addiction sexuelle et quelle est sa cause [13]?
  • Quel est le rôle et l'importance des apprentissages ?

Au fur et à mesure qu'apparaissaient ces questions, des chercheurs et des sexologues ont proposé des explications : les apprentissages sont un complément de l'instinct ; le couple est uni par l'amour ; le baiser sert à augmenter l'excitation sexuelle pour faciliter le coït vaginal[14] ; les caresses sensuelles sont des préliminaires aux activités érotiques. De plus, comme la fécondation guidée par l'instinct était la norme de référence, la pathologie a souvent été invoquée pour expliquer les activités non reproductrices : la masturbation est un vice moral[15] ; l'homosexualité est, suivant les auteurs, une anomalie génétique[16], un dérèglement hormonal, un trouble du développement[17], ou une inversion de l'instinct[18] ; la bisexualité est un état d'immaturité temporaire, de transition entre l'hétérosexualité et l'homosexualité ; la sexualité de groupe provient de troubles psychologiques ; la sodomie est une perversion[19] ; les activités sexuelles inter-espèces sont une maladie.

Mais la majorité de ces explications sont difficilement vérifiables ou vagues, et ne sont pas toutes confirmées par les observations éthologiques ou ethnologiques : par exemple, le couple uni par l'amour n'est pas une stratégie privilégiée des mammifères, puisque moins de 5 % des espèces sont monogames (renard, chacal, castor, gibbon, siamang…)[20]. La bisexualité est commune chez tous les hominidés[9],[10], il est alors difficile de la considérer comme une maladie ou un trouble psychologique. Dans la majorité des sociétés, le baiser n'est pas pratiqué (ni d'ailleurs dans la majorité des espèces de mammifères)[21], ce qui montre que sa fonction supposée d'augmenter l'excitation sexuelle n'est pas indispensable. De plus, dans les sociétés où la sexualité est fréquente et valorisée (en particulier en Océanie : Marquisiens, Hawaïens, Tahitiens…), les hommes et surtout les femmes n'ont apparemment pas de problèmes d'excitabilité sexuelle.

« Les femmes marquisiennes n'ont apparemment pas de difficulté à avoir un orgasme ; elles semblent capables d'atteindre cet état orgastique seulement après un petit nombre d'expériences sexuelles, et elles apprennent rapidement à le contrôler de telle sorte qu'elles atteindront l'orgasme avec le partenaire[22]. »

De plus, l'accumulation de ces explications diverses a produit un modèle explicatif de la sexualité humaine : une hypothèse de base, fondée sur l'instinct et les hormones[23], qui n'explique qu'une minorité des faits, et qui doit être complétée par de nombreuses justifications particulières pour chacun des nombreux faits inexpliqués.

En conclusion, le modèle du comportement de reproduction, chez les primates, ne peut expliquer de manière satisfaisante toutes les nombreuses activités érotiques différentes du coït vaginal[7].

Données scientifiques publiées autour des années 2000[modifier]

Des données scientifiques publiées autour des années 2000 et complétées par des données plus anciennes, vont permettre de proposer pour les primates une alternative au modèle du « comportement de reproduction ».

Affaiblissement de l'influence des hormones[modifier]

Hormones : molécule d'estriol

Les hormones sont un facteur majeur et primordial du comportement de reproduction chez les mammifères inférieurs. Quelles sont alors leurs fonctions et leur importance chez les primates et chez l'Homme ?

Absence de contrôle temporel. Les hormones exercent chez les mammifères inférieurs un contrôle temporel, qui peut être saisonnier, œstral ou pubertaire.

Chez l'être humain, le contrôle saisonnier a quasiment disparu : les activités sexuelles existent toute l'année. Les hormones ont encore une faible influence, mais il faut utiliser des méthodes statistiques pour mettre en évidence un cycle sexuel saisonnier qui est résiduel[24]. Chez la femme, le contrôle œstral a également quasiment disparu : les activités sexuelles existent tout au long du cycle menstruel. Néanmoins, une faible influence hormonale existe : en utilisant des analyses statistiques, il y a une plus grande fréquence des activités sexuelle à la période périovulatoire[25].

Le contrôle pubertaire, également, a quasiment disparu : si le contexte culturel le permet, les activités sexuelles débutent dès les premières années de la vie[26],[21],[22],[27],[28].

En conclusion, l'influence des hormones sur les activités sexuelles diminue en fonction du développement du cerveau. L'influence est maximale chez les rongeurs, atténuée chez les primates et faible chez l'être humain[3].

« L’homme apparaît comme le terme d’une évolution où la part prise par le système nerveux central devient dominante, tandis que le signal hormonal, tout en restant présent et actif, perd de son importance pour n’être que facultatif[2]. »

Affaiblissement de l'influence des phéromones[modifier]

Phéromones : molécule d'ectocarpene

Les phéromones sont le principal mode de communication des organismes vivants[29]. Quelles sont alors leurs fonctions et leur importance chez les primates et chez l'Homme ?

Orientation sexuelle. Des données importantes, publiées en 2002 et 2007 dans les revues Science et Nature, proviennent des travaux de Catherine Dulac à l'université de Harvard aux États-Unis. Des souris mâles dont l'organe voméronasal est inactivé ne reconnaissent plus le partenaire de sexe opposé. Ces mâles se mettent alors à copuler avec des femelles et avec des mâles[30],[31]. Ces expériences montrent que ce sont les phéromones qui permettent la reconnaissance du partenaire de sexe opposé, c'est-à-dire qui permettent l'orientation sexuelle des rongeurs[32]. Ces données montrent également qu'en l'absence des informations phéromonales, le comportement sexuel des rongeurs devient bisexuel[33],[34].

Altération du système voméronasal. D'autres données, publiées en 2003 dans PNAS, sont complémentaires aux travaux de Catherine Dulac. Ces données proviennent des travaux de Jianzhi Zhang et de David Webb à l'Université du Michigan aux États-Unis. Grâce à des techniques de séquençage des gènes (PCR), ils ont montré que les gènes de l'organe voméronasal étaient altérés chez les Catarrhiniens (les primates de l'ancien monde : homme, chimpanzé, orang outan, gorille, gibbon, babouin…). Ces travaux indiquent que l'organe voméronasal de ces primates est altéré, et donc que la capacité de cet organe à détecter des phéromones est également altérée[4].

Des travaux antérieurs avaient déjà montré que chez l'être humain les phéromones n'avaient qu'un effet physiologique mineur, et n'avaient que peu d'effet émotionnels et comportementaux[5]. L'altération du système voméronasal en est certainement une des causes. De plus, combiné aux travaux de Catherine Dulac, l'altération de l'organe voméronasal des primates suggère que l'être humain ne pourrait plus reconnaître le partenaire de sexe opposé à partir des informations olfactives innées.

En synthèse : chez les primates et surtout chez l'Homme, les phéromones n'ont plus qu'un effet faible, sur le comportement sexuel.

Reformulation de la notion d'« instinct »[modifier]

Instinct bisexuel ? D'autres données importantes, publiées en 2007 dans Nature, proviennent également des travaux de Catherine Dulac à Harvard.

Des expériences sur des souris ont montré qu'une souris femelle avait dans son cerveau les structures nécessaires à produire un comportement sexuel mâle[31]. Ces expériences, qui confirment des travaux antérieurs[34], montrent que le cerveau des mammifères inférieurs est équipé pour avoir des comportements bisexuels[33].

Le modèle hormonal classique du développement, avec ses phases organisationnelles et activationnelles, supposait que la différenciation sexuelle était plus importante : le cerveau de la femelle avait un circuit sexuel femelle et le cerveau du mâle avait un circuit sexuel mâle. Ce modèle serait donc à revoir partiellement[35].

Les expériences de Catherine Dulac permettent de comprendre les raisons pour lesquelles on observe chez les mâles ou les femelles des comportements d'inversion de genre (le mâle se comporte comme une femelle et la femelle comme un mâle. Observé chez : Bonobos, Macaque, etc.[9]), et surtout, de comprendre l'existence des comportements bisexuels chez les mammifères[9],[10].

Instinct partiel ? D'autres données, neurobiologiques et anthropologiques, proviennent des travaux de Serge Wunsch et de Philippe Brenot à l'EPHE-Sorbonne à Paris. Ces travaux montrent qu'il n'existe qu'un instinct sexuel partiel[8], et que des apprentissages cruciaux sont nécessaires à l'expression du comportement de reproduction[7].

En synthèse : Ces données montrent que la notion d'« instinct », ainsi que les conceptions classiques de la différenciation sexuelle du cerveau, sont à reformuler, au moins partiellement.

Stimulation des zones érogènes[modifier]

Comportement érotique. Des observations éthologiques importantes, publiées de 1990 à 2008 dans plusieurs ouvrages, proviennent des travaux sur le comportement sexuel des grands singes (Chimpanzés, Orang outan, Gorille…). Les travaux les plus connus sont ceux de Frans de Waal à l'Université d'Emory aux États-Unis. Ses études ont montré la grande diversité du comportement sexuel du chimpanzé pan paniscus (bonobo)[36],[37]. La plupart des nombreuses et fréquentes activités sexuelles qu'il a observées n'ont aucun rapport avec la fécondation, ce qui n'est pas très compatible avec l'existence d'un instinct de reproduction.

Ces observations montrent, de plus, que l'existence de nombreuses activités érotiques sans rapport avec la fécondation, permet néanmoins la reproduction et la survie de l'espèce.

Exubérance sexuelle. D'autres observations éthologiques importantes concernant le comportement sexuel des grands singes ont été rassemblées et analysées par Bruce Bagemihl. Son livre, publié en 1999, montre l'« exubérante » diversité du comportement sexuel de différentes espèces animales, et en particulier des primates[9]. Comme les travaux de Frans de Waal, l'étude de Bagemihl montre que ces comportements ne sont guère compatibles avec un instinct de la reproduction.

En synthèse, les observations éthologiques du comportement sexuel des grands singes ne sont guère compatibles avec l'existence d'un instinct de reproduction ou d'un « comportement de reproduction ».

Prépondérance des renforcements / récompenses[modifier]

Les différentes structures du circuit des récompenses sont distribuées le long du faisceau médian du télencéphale (MFB) : aire tegmentale ventrale (ATV), amygdale, noyau accumbens, septum et cortex préfrontal.

Prépondérance des renforcements. Des analyses et des données importantes proviennent des travaux d'Anders Agmo à l'Université de Tromsø en Norvège. Après une trentaine d'années de recherche en neurobiologie du comportement sexuel, Anders Agmo a publié en 2007 chez Elsevier un ouvrage qui est une synthèse de ses recherches et des connaissances sur le sujet. Les résultats de ses analyses indiquent que les renforcements / récompenses sont le principal facteur à l'origine du comportement sexuel chez l'être humain[6].

L'importance des renforcements dans le comportement sexuel avait déjà été remarqué par plusieurs chercheurs[38].

Zones érogènes. Des travaux de Winkelmann montrent que les zones érogènes génitales sont constituées de tissu muco-cutané, et que ce tissu se trouve à tous les orifices corporels, ou à proximité (pénis/clitoris, le prépuce, la partie externe de la vulve, la peau périanale, les mamelons et les lèvres), en transition entre l'extérieur et l'intérieur de l'organisme, entre la peau et les muqueuses internes[39].

Or la plupart de ces orifices sont des zones érogènes stimulées au cours des activités érotiques (organes génitaux, lèvre, mamelon, peau péri-anale). Ce qui suggère fortement que le tissu muco-cutané serait du tissu érogène, et, en relation avec les récompenses, créerait un système à l'origine de la répétition des stimulations du corps. La stimulation de ce tissu au niveau des zones érogènes activerait les récompenses, produisant une sensation consciente de plaisir érotique, ce qui entraînerait ainsi le désir de répéter cette activité de stimulation, pour obtenir encore du plaisir.

Stimulations hédoniques. Les travaux de neurophysiologie et de neuroimagerie d'Hakan Olausson à l'Université de Göteborg en Suède, et de Johan Wessberg à l'Université de Liverpool en Grande-Bretagne, publiés entre 2002 et 2008, ont montré que la peau poilue du corps était en relation avec le cortex insulaire, région impliquée dans le traitement des sensations hédoniques[40],[41],[42]. Ces travaux montrent une relation fonctionnelle entre la stimulation du corps et la production de sensations agréables, ce qui permettrait d'expliquer la raison pour laquelle les primates sont des animaux de contact.

En simplifiant, les mammifères rechercheraient le contact physique, les stimulations du corps ou les caresses, car la stimulation du corps procurerait du plaisir[40],[41],[42]. Ces résultats expliqueraient également la continuité entre les caresses agréables, les caresses sensuelles et les caresses érotiques, puisque la peau poilue se trouve sur presque tout le corps, ainsi qu'à proximité des zones érogènes et du tissu mucco-cutané.

Conditionnements. S'il n'existe pas d'instinct sexuel[43], et si la stimulation du corps et des zones érogènes dépend des récompenses, alors cela signifie que le comportement sexuel humain est appris, et appris par conditionnements (par conditionnement opérant avec un renforcement primaire sexuel[6]). Alors toutes les lois des apprentissages associatifs[44] s'appliquent au développement du comportement sexuel.

L'importance des conditionnements dans le comportement sexuel avait déjà été remarqué par plusieurs chercheurs[45].

En synthèse, ce résultat est très intéressant, car il permet d'expliquer le comportement sexuel par un seul facteur, principal et primordial, les renforcements / récompenses :

  • Cette hypothèse est compatible avec le modèle et les résultats béhavioristes. Le comportement sexuel est appris essentiellement par conditionnement pavlovien et skinnérien[6].
  • Cette hypothèse permet d'expliquer avec un seul et même facteur quasiment toutes les activités érotiques : si l'être humain pratique la masturbation (autosexualité), le baiser (activité sans relation avec les organes génitaux), la fellation ou le cunnilingus (activités oro-génitales), ou le coït vaginal (qui permet la reproduction), que ce soit avec une personne de sexe différent (hétérosexualité), de même sexe (homosexualité) ou des deux sexes (bisexualité), c'est toujours essentiellement pour obtenir des récompenses.
  • Les renforcements / récompenses, sont des processus inconscients, mais ils sont perçus comme des sensations de plaisir sexuel. Ce qui signifie, en simplifiant, que l'être humain recherche les activités sexuelles surtout pour obtenir du plaisir érotique.
  • Et cela correspond à ce que chacun ressent subjectivement : on recherche des stimulations érotiques du corps et des zones érogènes car ces stimulations procurent des plaisirs intenses.

Prépondérance de la cognition[modifier]

Comparaison des cerveaux de différents mammifères

Au cours de l'évolution, la taille et l'organisation du cerveau des mammifères a changé[46]. Les capacités cognitives (mémoire, raisonnement, abstraction, symbolisation, création d'outils …) du cerveau humain se sont développées, tant au niveau quantitatif que qualitatif[47]. Sur l'image ci-contre, on remarque les différences importantes entre les espèces. Le cerveau de l'être humain (en haut à gauche) est bien différent de celui des souris (en bas à droite, agrandir l'image pour voir). La très grande différence de taille provient surtout du développement du néocortex, qui est la structure qui permet la cognition. Cette image suggère bien l'importance majeure des processus cognitifs chez l'être humain.

De plus, des recherches en sociologie, ainsi que des travaux d'ethnologie réalisés durant tout le XXe siècle, par la confrontation de l'extrême diversité des pratiques et des croyances sexuelles, ont mis en évidence l'importance de la culture dans le développement de la sexualité humaine[48],[21]. La culture étant rendue possible par le développement des capacités intellectuelles, ces travaux montrent, indirectement, l'importance devenue prépondérante chez l'être humain des capacités cognitives dans la sexualité.

Le « bricolage de l'évolution »[modifier]

Enfin, les travaux sur l'évolution de Stephen Jay Gould et de François Jacob (lauréat du prix Nobel de physiologie ou médecine de 1965), expliquent la persistance au cours de l'évolution du comportement érotique, bien qu'il ne semble guère optimisé pour réaliser la reproduction.

La théorie de François Jacob est généralement désignée par la métaphore du « bricolage de l'évolution »[49],[50]. Cette théorie, basée sur l'observation des bizarreries et des imperfections du monde vivant, suppose que l'effet majeur de la sélection naturelle n'est pas l'optimisation mais plutôt l'élimination des organismes non viables. C'est-à-dire passer de l'idée que tout ce qui n'est pas optimisé est évolutivement impossible à l'idée que tout ce qui survit – peu importe la manière – est possible.

Stephen Jay Gould a également critiqué l'importance démesurée accordée à l'effet d'optimisation : « La théorie de l'évolution, telle qu'elle est présentée dans de nombreux textes de vulgarisation, attribue à la sélection naturelle le rôle d'un principe de perfection qui opère avec tant de précision et d'omnipotence que les animaux paraissent répondre à un ensemble de mécanismes incorporés, programmés pour leur faire atteindre une forme optimale[51] ».

Par exemple, chez les chimpanzés pan paniscus (bonobos), le comportement sexuel n'est pas optimisé pour la reproduction : les trois quart des activités sexuelles ne permettent pas la fécondation (masturbation, activités homosexuelles, activités prépubères, baiser, etc.) et, en moyenne, chaque individu pubère a quotidiennement plusieurs activités sexuelles permettant la reproduction, ce qui peut apparaître comme un « gaspillage » pour l'unique fécondation et gestation annuelle[9],[52],[36]. Néanmoins, ce comportement non optimisé permet la reproduction et la survie de l'espèce.

La conclusion de ces travaux est que l'évolution est le résultat de l'action de plusieurs facteurs : la sélection naturelle, la sélection sexuelle, mais aussi le hasard, qui explique que les organismes vivants ne sont pas complètement optimisés et parfaits.

Également, dans une analyse de l'évolution plus positive, le comportement érotique peut avoir des avantages en termes d'adaptation[53] : renforcement des liens sociaux[54], apaisement des conflits, réconciliation [36],[37]

Conclusion[modifier]

En synthèse de toutes ces données anciennes et nouvelles :

  • Les êtres vivants ne sont pas optimisés. Le comportement érotique a des avantages sociaux.
  • Les hominidés pratiquent diverses activités sexuelles de stimulation des zones érogènes (peu compatibles avec un instinct de la reproduction).
  • Le concept d'instinct est à reformuler.
  • L'influence des hormones et des phéromones diminue graduellement, des rongeurs à l'Homme
  • Les renforcements / récompenses et la cognition deviennent prépondérant chez les primates

Toutes ces données étaient disponibles dans les années 2000, et elles ont été progressivement intégrées de manière cohérente dans un nouveau modèle, celui du “comportement érotique”[1].

Changement de modèle : le « comportement érotique »[modifier]

Une étape cruciale dans l'étude d'un comportement est d'identifier, de décrire et d'évaluer l'importance des différents facteurs qui sont : 1) à l'origine du développement de ce comportement, et 2) qui participent au fonctionnement de ce comportement à l'état adulte.

Pour simplifier, il y a plusieurs types de facteurs :

  • primordiaux : ceux qui sont les plus importants et qui interviennent avant les autres.
  • innés : ceux qui existent dès l'origine dans l'organisme.
  • acquis : ceux qui sont en général appris au cours des interactions avec l'environnement.

Ces différents facteurs déterminent le développement et la dynamique du comportement sexuel.

Chez les mammifères inférieurs (rongeurs, canidés, bovidés …), le comportement de reproduction est contrôlé par cinq facteurs innés principaux :

  1. hormones
  2. phéromones
  3. réflexes sexuels
  4. renforcements / récompenses
  5. cognition
Importance croissante des aires associatives du rat à l’humain. Chez l'Homme, les aires associatives représentent l'essentiel du cortex cérébral.
Légende : Aire sensorimotrice en vert; aire visuelle en rouge, aire auditive en bleu.
Parmi les aires associatives, le cortex préfrontal (en grisé) est la structure cérébrale qui a le plus évolué chez l'être humain. Et c'est le cortex préfrontal qui permet les processus cognitifs les plus complexes (symbolisation, planification, réflexion…).

Chez les mammifères inférieurs, les hormones et les phéromones sont les facteurs innés primordiaux, ce qui peut être représenté de la manière suivante :

  • hormones
    • phéromones
      • réflexes sexuels
        • renforcement
          • cognition

Mais au cours de l'évolution, la structure des mammifères a évolué, et en particulier celle du cerveau. Les deux figures ci-contre suggèrent bien l'importance des modifications cérébrales, structurelles et fonctionnelles, entre les espèces.

Chez les primates, avec la prépondérance des renforcements / récompenses et de la cognition, et l'affaiblissement des hormones et des phéromones, la représentation graphique de ces données devient :

  • renforcement
    • cognition
      • réflexes sexuels
        • hormones
          • phéromones

La cognition devient le facteur majeur chez l'être humain.

Ainsi, au cours de l'évolution, il y a un transfert graduel du contrôle du comportement sexuel : des hormones et des phéromones aux renforcements et à la cognition. Ce sont toujours les mêmes facteurs, mais leur importance relative est modifiée. Ce qui modifie la dynamique du comportement sexuel.

Le comportement de reproduction devient graduellement un comportement érotique.

Dynamique du comportement érotique[modifier]

Exemple du spina bifida[modifier]

(1) Poche externe avec du liquide cérébro-spinal ; (2) Moelle épinière coincée entre les vertèbres

La pathologie du spina bifida peut expliquer la dynamique du comportement érotique. Dans cette pathologie, la moelle épinière se développe en partie en dehors du corps et se retrouve écrasée par les vertèbres. Ce qui provoque souvent des lésions médullaires et dans ce cas les sensations provenant des organes génitaux ne parviennent plus au cerveau.

Le comportement érotique se limite à la partie haute du corps, au-dessus de la lésion médullaire. Ce sont uniquement les zones érogènes préservées qui sont stimulées, c'est-à-dire celles qui sont encore reliées au cerveau[55],[56].

De plus, ces activités (baiser, stimulation des seins…) ne permettent pas la reproduction. Cependant le comportement érotique existe toujours, mais il est limité aux régions du corps où il existe encore de la sensibilité tactile. Par contre, comme il n'y a plus d'activités génitales spontanées, le coït vaginal permettant la fécondation n'est pas pratiqué (sauf si la personne exécute volontairement chaque mouvement permettant le rapport sexuel, dans l'objectif de procréer). La pathologie du spina bifida met ainsi en évidence une dissociation entre le comportement érotique et le comportement de reproduction.

Le spina bifida met également en évidence l'importance cruciale pour le comportement érotique : 1) des relations, grâce aux nerfs, entre les zones érogènes et le cerveau, et 2) de l'importance majeure des zones érogènes, car chaque zone peut provoquer l'apparition d'une activité érotique propre à cette zone.

En effet, quand les nerfs médullaires sont détruits ou sectionnés, les organes génitaux n'ont plus de sensibilité tactile et érogène, ce qui entraîne l'absence des activités érotiques génitales (comme l'absence de la masturbation). Si l'activité motrice de masturbation était « instinctuelle » ou « programmée » dans le cerveau, la personne pourrait continuer à se masturber ; ce qui n'est pas le cas. En conclusion, une relation anatomique entre la zone érogène et le cerveau est nécessaire à l'apparition d'une activité érotique.

Ensuite, le spina bifida (et également les lésions médullaires accidentelles) entraîne l'apparition de nouvelles zones érogènes (phénomène appelé « transfert érogène », par exemple vers la nuque ou l'épaule). Alors, les personnes stimulent ces nouvelles régions pour ressentir du plaisir. Ce plaisir provoqué par la stimulation des nouvelles zones érogènes est un peu différent du plaisir érotique ; les personnes ressentent des « frissons ou sensations particulières », une « impression de bouffées de chaleur », ou des para-orgasmes. En conclusion, l'existence d'une zone corporelle érogène induit le développement d'une activité motrice, répétée, de stimulation de cette zone[55],[56].

C'est d'ailleurs un phénomène similaire qui est l'origine des stimulations non sexuelles du corps. Les travaux d'Olausson ont montré que les caresses sur la peau poilue du corps provoque une activation dans le cortex insulaire, une région impliquée dans les sensations de plaisir[40],[41],[42]. On retrouve un schéma fonctionnel similaire : la stimulation du corps procure différentes sensations de plaisirs, et l'être humain répète les stimulations de son corps pour obtenir ces plaisirs.

Rôle des renforcements / récompenses[modifier]

Rappel : les différentes structures du circuit des récompenses sont distribuées le long du faisceau médian du télencéphale (MFB) : aire tegmentale ventrale (ATV), amygdale, noyau accumbens, septum et cortex préfrontal.

La région cruciale du cerveau à l'origine de la répétition des stimulations du corps est le système limbique, avec principalement le système des renforcements / récompenses. Les principales structures de ce système sont l'aire tegmentale ventrale, le noyau accumbens, l'hypothalamus latéral, le septum, l'amygdale et le cortex préfrontal.

Plusieurs expériences, réalisées chez l'animal et chez l'être humain, confirment l'importance de ce système des récompenses dans le comportement sexuel. Grâce à l'imagerie cérébrale, on observe chez l'homme que l'éjaculation et l'orgasme activent l'aire tegmentale ventrale[57].

Jaak Panksepp, un neurobiologiste spécialisé dans l'étude des émotions, a montré que déjà chez le rat, quand on implante une électrode dans le septum médian, l'animal apprend très vite à appuyer sur une pédale pour stimuler électriquement cette région. Le rat manifeste alors des réactions émotionnelles de « plaisir » et répète lentement et méthodiquement la stimulation, durant une longue période. Les êtres humains qui sont stimulés dans cette même région, au cours d'opérations chirurgicales, disent ressentir des sensations sexuelles agréables[58]. De plus, l'injection dans cette région d'acétylcholine, un neuromédiateur excitateur, déclenche un orgasme[59],[60]. Ces résultats suggèrent l'existence d'un système de « plaisir sexuel » dans le cerveau[61],[62].

En synthèse, toutes ces données montrent que les zones érogènes, reliées par les nerfs au système de renforcements / récompenses, sont à l'origine de la répétition des stimulations du corps.

Rôle des hormones[modifier]

Il est largement admis que les hormones, et en particulier les androgènes, exercent un effet déterminant sur le comportement sexuel[63]. Cet effet s'exerce : 1) durant le développement de l'organisme sur l'anatomie et la physiologie du corps et de l'appareil reproducteur (effet organisationnel[64]), et 2) sur le comportement sexuel (effet activationnel[64]). Quand les androgènes sont supprimées, surtout chez les mâles, c'est toutes les activités sexuelles qui disparaissent, qu'elles soient hétérosexuelles ou homosexuelles[34]. Il faut un minimum d'androgène dans l'organisme (testostéronémie d'environ 2,5 ng/ml de sang chez l'homme) pour que l'activité sexuelle ne soit pas altérée.

Mais quand le niveau des hormones est normal, est-ce une hormone qui va être à l'origine d'une activité érotique particulière, comme le baiser, la fellation, ou la masturbation ? Est-ce une hormone qui agit sur des neurones moteurs pour provoquer la masturbation réciproque ou sur un circuit précablé pour déclencher l'anulingus ?

Il n'existe aucune donnée scientifique qui supporte cette hypothèse[65] :

« Nos connaissances endocrinologiques ne permettent pas d’expliquer les comportements sexuels paradoxaux [différents du coït vaginal : masturbation, activités homosexuelles ou prépubères, etc.]. L’existence d’un comportement de monte chez la femelle, en œstrus ou non, est couramment observée dans de très nombreuses espèces (Rongeurs, Canidés, Ongulés, etc.), de même que chez les jeunes animaux: on voit des agneaux de quelques jours chevaucher leurs congénères. Ici le mécanisme moteur du comportement de monte apparaît sans qu’il y ait eu de sécrétion de l’hormone mâle. De tels cas [sont] suffisamment fréquents pour que l’on puisse les considérer dans ces espèces comme normaux[2]. »

En conclusion, les hormones sexuelles sont nécessaires (différenciation sexuelle en mâle et femelle, nécessité d'un taux minimal (2,5 ng/ml) dans l'organisme, etc.), mais pas suffisantes. En plus des hormones, il faut encore un autre facteur. Et toutes les données exposées dans les paragraphes précédents montrent que se sont les récompenses, associées aux zones érogènes, qui vont être à l'origine des différentes activités érotiques.

Modélisation[modifier]

En fonction de toutes les données présentées ci-dessus, quel serait la dynamique du comportement érotique ?

Et en donnant aux renforcements le rôle primordial, c'est-à-dire qu'ils sont le facteur le plus important et surtout qu'ils agissent avant la cognition, les hormones et les phéromones, la dynamique érotique serait, en schématisant et en simplifiant[6],[7] :

  • Les renforcements / récompenses et les zones érogènes sont innés et existent dès les premières années de la vie.
  • Les premières stimulations des zones érogènes activent les récompenses, ce qui provoque par conditionnementles répétitions ultérieures de ces stimulations.
    • Par exemple, le jeune enfant explore son corps, trouve et touche ses organes génitaux, et, comme c'est très agréable, il répètera régulièrement cette activité (sauf si elle lui est interdite[note 2]).
  • Ces apprentissages par conditionnements, associés avec toutes les autres formes d'apprentissages (sociaux, cognitifs …[44]), permettent le développement du comportement érotique[66].
  • Comme il existe plusieurs zones érogènes (génitale, anale, orale, pectorale …), chaque zone peut être l'objet d'activités érotiques particulières, et ainsi les activités érotiques deviennent diversifiées.
  • Comme les hormones et les phéromones n'ont plus qu'une action faible, les activités érotiques sont continues tout au long du cycle menstruel[25], continues toute l'année[24] et sont plutôt bisexuelles (sauf si elles sont culturellement réprouvées)[10],[9].
  • Suivant le contexte culturel, certaines activités érotiques sont valorisées, favorisées ou seulement admises, tandis que d'autres sont dévalorisées, réprouvées ou interdites[note 2],[48].
  • La majorité des personnes d'une société donnée éprouve, par conditionnement culturel, du mépris ou du dégoût pour les activités socialement réprouvées, et de l'approbation ou de la fierté pour les activités socialement valorisées.
    • Par exemple, les Marquisiens du XIXe siècle étaient très fiers de la propreté de leurs organes génitaux qu'ils lavaient régulièrement et méticuleusement, car dans leur culture l'hygiène sexuelle était très valorisée, et ils méprisaient les Européens en raison de la « saleté » de leurs organes génitaux[22].
  • Les activités érotiques non reproductives, comme la masturbation ou le baiser, s'expliquent par la recherche du plaisir.
  • Les activités reproductrices existent et sont favorisées car les organes génitaux sont les zones les plus érogènes du corps[67].
  • Cette description correspond globalement aux observations éthologiques et ethnologiques du comportement sexuel observé chez les primates[9] et dans les différentes sociétés humaines[21].
  • Cette description correspond globalement à ce que plusieurs perçoivent intuitivement. Les humains ont des activités sexuelles pour le plaisir (comportement érotique), et pas pour avoir des enfants (comportement de reproduction).

Comment cette dynamique comportementale se développe-t-elle, de la vie fœtale jusqu'à la période du vieillissement ?

Développement du comportement érotique[modifier]

En schématisant et en simplifiant, on peut distinguer plusieurs phases ou périodes physiologiques, cognitives, psychologiques et psychosociologiques dans le développement du comportement érotique[6],[7] :

L'enfance[modifier]

Anténatal[modifier]

Échographie d'un pénis en érection (flèche blanche), chez un fœtus de 36 semaines.

La première phase du développement du comportement érotique est la période fœtale.

Cette période correspond principalement au développement des tissus biologiques, des organes et des fonctions somatosensorielles qui sont directement impliqués dans le comportement érotique. On observe en particulier le développement du tissu mucco-cutané décrit par Winkelman[39], et le développement des réflexes sexuels qui sont observés par échographie. La vasocongestion des organes génitaux existe apparemment dès la 12e semaine[68] et l'érection a été observée dès la 23e semaine[69],[70]. Vers la fin de la gestation, 75 % de ces érections sont associées à des phases similaires au sommeil paradoxal[71], suggérant que les relations entre le cerveau et le réflexe érectile sont déjà bien développées. À cette période apparaissent des stimulations génitales qui ressemblent à de la masturbation[72],[73], et quelques cas de réactions comportementales qui suggèrent l'orgasme ont été observés[74],[75]. En conclusion, à la naissance, plusieurs réflexes sexuels sont déjà fonctionnels[76].

Articles connexes : Masturbation et Érection.

Postnatal[modifier]

La seconde phase du développement du comportement érotique est une période de préparation fonctionnelle (phase préliminaire).

Cette période, de 0 à 2-4 ans environ, correspond principalement au développement fonctionnel de divers processus et fonctions, qui ne sont pas “sexuels”, mais qui sont absolument nécessaires à l'expression du comportement érotique. Principalement les zones pileuses décrites par Olausson, et qui sont impliquées dans les stimulations agréables du corps[40],[41],[42], le développement des zones érogènes, et, surtout, la maturation des capacités motrices[46], qui est évidemment absolument indispensable à l'expression du comportement érotique. À la fin de cette période, l'organisme est potentiellement prêt pour apprendre les activités érotiques, à condition qu'il existe des événements déclencheurs externes qui vont initier l'apprentissage des premières activités érotiques.

Latence[modifier]

La troisième phase du développement du comportement érotique est la phase de latence.

Cette période, qui peut peut aller de 0 à 15 ans, est potentielle. Le concept de période de latence a été proposé par Freud en 1905[77]. À partir des études d'ethnologie comparative, on remarque que l'influence du contexte culturel est déterminante dans l'existence ou l'absence de cette période. En comparant les différentes sociétés humaines, on observe qu'il existe des sociétés qui autorisent et d'autres qui interdisent la sexualité infantile[21]. Si le contexte culturel permet l'expression de certaines activités érotiques, alors on observe qu'il n'existe pas de période de latence. Si la sexualité des enfants est interdite, on observe qu'il existe alors une latence qui va être conforme aux interdits culturels[26],[22],[28].

Par ailleurs, on observe que la latence peut être sélective : par exemple en Occident la durée de la latence pour le baiser est d'environ 12-14 ans, mais de 17 pour le coït[78], en raison des valeurs culturelles particulières données à chacune de ces deux activités érotiques. On remarque donc que les particularités des normes culturelles déterminent les caractéristiques de la latence. Au niveau physiologique, il n'existe aucun lien significatif entre les hormones sexuelles, la puberté et les activités érotiques : le premier pic d'androgènes a lieu durant les trois premiers mois après la naissance puis redescend à un niveau basal jusqu'à la puberté[79], alors qu'on observe dans les sociétés humaines les plus permissives que les enfants ont des activités sexuelles avant l'âge de 10 ans[21], donc bien avant la puberté. Enfin, la durée maximale de la période de latence serait d'environ une quinzaine d'années. En effet, après la puberté, il devient difficile de maintenir des interdits sexuels.

Chez les hominidés non humains, les activités sexuelles juvéniles sont socio-sexuées (c'est-à-dire complètement intégrées dans la vie sociale quotidienne), et il n'existe aucune forme de latence. C'est surtout chez les mammifères inférieurs, et surtout chez les femelles, qu'on observe une latence hormono-dépendante qui prend fin à la puberté[21],[9]. En conclusion, chez l'être humain, la période de latence est un phénomène potentiel, multiforme, et complètement dépendant du culturel.

Initiation[modifier]

La quatrième phase du développement du comportement érotique est la phase d'initiation.

Cette période très courte correspond aux premières stimulations du corps ou des zones érogènes, qui vont activer les renforcements / récompenses, initiant ainsi les premières activités érotiques[6]. Cette période dépend du contexte culturel : s'il n'existe pas d'interdits culturels, les premières stimulations peuvent avoir lieu dès les premières années de la vie ; si les interdits sont très stricts, comme par exemple pour la masturbation au XIXe siècle[note 2], la période de latence sera longue et la découverte des premières activités érotiques pourra être tardive, après la puberté.

Les principaux évènements qui peuvent activer les premiers renforcements érotiques sont[80],[81] :

  • Les soins parentaux : la tétée, la toilette, l'affection physique, etc. Par exemple, on observe que le nourrisson est parfois en érection quand il tète sa mère.
  • Les contacts sexuels avec d'autres enfants lors des jeux sociaux et sexuels (quotidiens dans les sociétés qui autorisent la sexualité des enfants[26],[22],[28]).
  • Et l'auto-stimulation des organes génitaux ou la masturbation. La disposition anatomique des bras et des mains est extrêmement propice à l'autostimulation. Donc, sauf si les adultes empêchent activement l'enfant de toucher ses organes génitaux, l'autostimulation aura lieu dès les premiers mois après la naissance. Et dès que l'enfant aura compris que le plaisir intense provient des stimulations génitales, il sera très motivé pour répéter ces activités.
Articles détaillés : Masturbation et Sexualité infantile.

Avec toutes ces possibilités, et en particulier avec l'autostimulation, il existe toujours des stimulations érotiques dès les premiers mois de la vie. Le contexte du développement rend cet apprentissage quasi obligatoire. Sauf interdits culturels, le développement des activités érotiques est quasi certain.

À noter que chez les hominidés non humains, où la sexualité juvénile est socio-sexuée, ces premières stimulations sont nombreuses et ont lieu dès la première année après la naissance (voir photographies ci-contre)[21],[9].

Au niveau neurobiologique et psychologique, ces premières stimulations érotiques activent les renforcements / récompenses, qui sont un renforçateur primaire[6]. Ces apprentissages érotiques correspondent à des apprentissages par conditionnement, de type opérant/skinnerien, avec un renforçateur primaire sexuel. Ces conditionnements sexuels sont à l'origine de nombreux apprentissages physiologiques et comportementaux[38],[45], qui participent au développement de la sexualité. C'est l'état érotique interne qui est déterminant pour les apprentissages sexuels, et pas le label culturel de la situation : dans l'exemple du nourrisson en érection et qui tète sa mère, la situation n'est pas culturellement considérée en Occident comme « sexuelle », alors que des renforcements érotiques sont en cours.

En conclusion, ces stimulations érotiques initiales provoquent l'apprentissage des premières activités érotiques et l'apprentissage de la motivation érotique. Après cette période d'initiation, le sujet a acquis une motivation érotique, et peut rechercher consciemment et volontairement des activités érotiques.

Puberté[modifier]

Développement du système pileux à la puberté

Chez les hominidés, et surtout chez l'homme, la puberté est caractérisée principalement par une augmentation de la vitesse de croissance de l'organisme, ainsi que par la maturation de l'appareil reproducteur (production de spermatozoïdes et d'ovules, cycle menstruel).

Sous contrôle hormonal, entre l'âge de 11 et 15 ans, on observe[82],[83] :

Après la puberté, l'être humain est physiologiquement apte à procréer.

Contrairement aux mammifères inférieurs (rongeurs, félidés, bovins…), la puberté n'est plus chez les hominidés la phase d'activation du comportement sexuel. Le contrôle hormonal a quasiment disparu, et, comme déjà indiqué, les activités érotiques débutent dès les premières années de la vie[21],[26],[22],[28],[9].

Pourtant dans les sociétés occidentales, il semble apparemment que les activités érotiques débutent après la puberté, ce qui suggère a priori l'influence activatrice des hormones[84]. Mais d'autres études montrent que l'influence des hormones est faible[85], et qu'il s'agit plutôt d'un fait social. C'est, provoqué par le passage de l'enfance à l'adolescence et de l'école au collège, la plus grande autonomie par rapport aux adultes, la volonté d'indépendance et surtout l'existence de nouveaux codes sociaux[86], qui sont les principaux facteurs de l'apparitions d'activités érotiques à l'adolescence[83].

En conclusion, la puberté correspond essentiellement à la maturation de l'appareil reproducteur, et l'influence des hormones sur les activités érotiques est faible.

Articles détaillés : Puberté et Appareil reproducteur.


14/04/2013
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