Bonjour à tous, C'est en surfant sur le net que je suis tombée sur ce forum. Je viens demander de l'aide et des conseils... Mariée depuis un peu moins de cinq ans, le diagnostic de bipolarité de mon époux est tombé il y a six mois. Bref historique: Mon mari a, dès le début de notre mariage, manifesté un comportement "spécial": crise d'achats compulsifs,grande dépendance à l'alcool, dépréciation quotidienne de ce que j'étais ou de ce que je faisais, violences physiques et verbales, incapacité à rester plus d'un an dans un emploi. Je ne comprenais pas ce qui se passait. Prise au piège de mon amour pour lui, je me disais qu'avec le temps, on règlerait ça. J'avais devant moi le témoignage de mes parents qui ont eu des débuts de couple très difficiles, ont failli divorcer, se sont battus à deux comme des chiens, et y sont arrivés. Je voulais y croire. D'autant plus que, mariée très jeune, j'étais effondrée à l'idée de casser cette union. Il y a environ un an et demi, il y a commencé une dépression. Enfin, il s'est décidé à aller voir une psychiatre. Très vite, et malgré un traitement très lourd, son état s'est aggravé. Il a fini par réclamer une hospitalisation, et c'est au cours de celle-ci (qui a duré trois mois) que le diagnostic de bipolarité est tombé. Soudain, beaucoup de choses sont devenues claires, dans son passé notamment. Moi, j'ai encaissé les choses. Comme d'habitude. Nous avons un enfant, il l'aime profondément: je voulais l'aider à se battre et rester là, coûte que coûte. D'ailleurs je voyais mal comment il pourrait faire sans moi: je fais tout, intégralement, à la maison. Bref, il a été mis sous lithium et aussi une espèce de calmant pour les grosses crises d'angoisse. Aujourd'hui, je suis infirmière, psy à domicile, chef de famille,malheureuse et épuisée. Je vis dans la peur depuis la première fois qu'il m'a frappée. Je passe mes journées à arrondir les angles, à m'écraser (parce que les rares fois où je n'ai pas voulu laisser passer certaines attitudes, ça s'est soldé par des bleus pour moi, et une énorme culpabilité pour lui, une fois revenu de sa crise maniaque). Je ne sais plus ce que c'est que ma dignité de femme et d'épouse. Je l'aime comme un malade et comme un frère qui me pourrirait la vie: plus comme un époux, ou si peu. J'ai cru que les cicatrices morales et affectives de son comportement envers mois, n'affecteraient pas mes sentiments et mon courage. Je me suis trompée. Je ne peux m'empêcher, contrairement à beaucoup de conjoints de bipolaires qui souffrent tellement qu'ils en viennent à oublier que leur compagnon/ compagne est MALADE, de continuer de vouloir le préserver, le respecter, l'aider sans l'infantiliser ou l'enfermer dans sa maladie. Mais je ne peux pas non plus m'empêcher de faire le bilan, en ce qui me concerne, des ravages de tout cela sur ma vie. Je suis épuisée physiquement et nerveusement: vivre dans la peur que notre banquière nous appelle furieuse parce que mon mari a encore fait n'importe quoi avec sa CB, vivre dans la peur que n'importe quoi lui fasse péter un plomb (il y a une semaine, crise d'angoisse et menace physique parce que je lui ai demandé de déplacer le lave-linge et qu'il n'était pas d'accord sur l'emplacement!!!); passer sur son égocentrisme absolu, sur sa dépendance à l'alcool qui nous ruine et fout en l'air nos soirées, nos nuits et nos matinées; élever notre fils seule (il ne fait RIEN), gérer la famille et les amis, et se dire que vu la façon dont il est atteint par sa maladie, on sait que rien ne sera jamais stable. En plus, je ne peux pas lui dire tout cela. Quand il est, rarement en plus, enfin dans une période à peu près normale, je me vois mal lui dire tout cela: les rares fois où j'ai essayé, ça l'a fait sombrer dans une phase dépressive. Il y a deux mois, j'ai essayé, pour la première fois, d'affronter la réalité en face: je ne peux plus vivre ainsi. Mes amis et ma famille, qui par ailleurs ont tous une grande affection pour lui et font la part des choses, pensent tous que je devrais partir. Pour me protéger, protéger Enzo, et le protéger lui-même de sa culpabilité par rapport à moi lorsqu'il pète les plombs. Pour la première fois, j'ai accepté de les entendre. Parce que ça me fait terriblement mal, mais je sais qu'ils ont raison. J'ai perdu 10 kilos, je pleure dès que je peux être seule (dans la douche, aux toilettes), je ne sais plus ce que c'est que de sourire ou de dire "je vais bien" depuis notre mariage. Je sursaute au moindre bruit. Je ne peux plus vivre ainsi. Le problème, c'est que je ne peux pas lui annoncer en face que je le quitte. Parce qu'il est tellement violent que je sais à quel point ça pourrait dégénérer. Mais un avocat m'a dit que partir avec notre fils et le lui annoncer par lettre ou par téléphone, c'était un enlèvement d'enfant. Et puis j'ai peur de ce qu'il fera. De ce qu'il pourra se faire ou faire. Je vous en prie, ne me jugez pas. Je sais combien la vie de certains bipolaires est lourde de souffrance et de combats incessants. Mais nous autres conjoints, croyez-moi, nous prenons notre part de douleurs, aussi... Merci à tous....
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