Cyclothymie versus psychose-maniaco-dépressive

 

 

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Cyclothymie versus psychose-maniaco-dépressive

 

7/09/2010
Auteur : Dr Hantouche

Bipo / Cyclo > Bipolarité adulte > Concepts / Classification

Pourquoi je préfère le terme ˮCyclothymieˮ à celui de ˮpsychose-maniaco-dépressiveˮ, voir même ˮBipolaireˮ, surtout pour les jeunes patients.
C’était de défendre une idée basique : "cyclothymie" me paraît plus adapté que le terme "psychose-maniaco-dépressive" qui a été longtemps utilisé par les psychiatres puis transformé en "bipolaire" - Ce trouble est, à l’heure actuelle, en souffrance d’être mal défini et donc, mal repéré et reconnu.

Les racines historiques de la cyclothymie sont plus anciennes que la psychose-maniaco-dépressive (PMD). Elle fût développée par un collaborateur de Kahlbaum, Ewald Hecker, en 1889. Un élève de Hecker, Karl Wilmanns reprit en 1906 la question de la cyclothymie. De 1884 à 1906, la signification du mot "cyclothymie" va évoluer. Il ne s’agit pas d’une "folie typique circulaire aboutissant à la démence" mais une forme clinique atténuée de la "folie maniaque dépressive" (définie par Kraepelin).

En France, la cyclothymie aura une autre signification.
Gaston Deny, chef de service de psychiatrie à la Salpêtrière (Paris) sera le premier à exposer la cyclothymie comme un déséquilibre de la sensibilité morale. Il se sépare ainsi de la conception allemande de Wilmanns. Deny affirme "A vrai dire, le mot de cyclothymie ne doit pas servir uniquement à désigner les formes frustes de la PMD. Il s’agit d’une exagération d’une constitution psychique spéciale qui préexiste à l’apparition des troubles et survit à leur disparition.""

Cette constitution psychique est désignée aujourd’hui par "Tempérament Cyclothymique". Le trouble cyclothymique serait une accentuation de ce tempérament :

"La constitution psychopathique désignée aujourd’hui sous le nom de cyclothymie est inséparable de celle des formes frustes ou atténuées de la psychose maniaco-dépressive, PMD, qui n’en sont que le grossissement ou l’amplification. Cette constitution cyclothymique est essentiellement caractérisée au point de vue clinique par des variations et des oscillations continuelles du ton affectif ou de l’humeur qui s’expriment par un sentiment général de bien-être ou de mal-être, lequel réagit et retentit, à son tour, sur toutes les modes de l’activité psychique".

Élève de Deny, Pierre Kahn va consacrer sa thèse inaugurale de Médecine sur la cyclothymie : "LA CYCLOTHYMIE : de la constitution cyclothymique et de ses manifestations (dépression et excitation intermittentes)", Paris, 1909 (Steinheil éditeur).

Il est déplorable que tout le travail fourni en France au début du 20ème siècle ne soit pas enseigné, reconnu et renforcé dans les décennies ultérieures. La majorité des cliniciens adopteront le concept de PMD, qui, certainement, met en évidence davantage les formes graves de la bipolarité. Par conséquent les psychiatres ont négligé les formes cliniques les plus légères ou atténuées de la bipolarité, comme la Cyclothymie.

Dans la tradition des grands experts comme Kahlbaum, Hecker, Deny et Kahn, le Dr Hantouche défend la place de la cyclothymie comme une forme basique la plus fréquente de bipolarité (6 fois plus fréquente que les formes épisodiques des troubles bipolaires type I et II).

Il se trouve que les troubles bipolaires avec cyclothymie se distinguent par un âge de début plus précoce, donc une forme qui capte le mieux la bipolarité juvénile (BPJ). De plus, la bipolarité juvénile (ou cyclothymie jubénile) se manifeste rarement avec des épisodes typiques de la bipolarité adulte. La succession rapide de cycles brefs d’hypomanie et de dépression intermittentes est la forme la plus typique de la BPJ. En d’autres termes, cyclothymie et bipolarité juvénile nous paraissent assez semblables et proches.

De plus, il est curieux de noter qu’avant la dichotomie de la PMD en "Unipolaire / Bipolaire" (au début des années 60), ce concept regroupait tous les troubles de l’humeur ; donc, un concept nettement plus large que celui de bipolarité. Cette réalité est actuellement ignorée par les psychiatres qui continuent de confondre entre PMD et "bipolarité", alors que celle-ci n’est qu’une partie de la PMD. A force d’entretenir cette confusion, les médecins ne reconnaissent que les formes typiques et sévères de bipolarité (voire même les formes psychotiques) et de ce fait la cyclothymie ne sera qu’exceptionnellement utilisée dans leur pratique.

Est-ce la faute â Kraepelin de ne pas utiliser le terme "Cyclothymie" et préférer celui de PMD ? Dommage, car dans cyclothymie, il y a la notion évolutive et dynamique de cycles (et de cercle) et de thymie (toutes les émotions) et le mot de "psychose ou folie" n’est pas du tout mentionné.

Est-ce la faute aux experts qui ont divisé la PMD en unipolaire et bipolaire sur la base de la présence d’épisodes typiques de "Manie" ? Une entité qui sera plus tard désignée par "bipolarité type I" et complétée par des formes type II, II1/2, III et autres.

En adoptant le terme de Cyclothymie, nous rendons hommage aux origines de la bipolarité d’une part et d’autre part à la réalité clinique qui touche plus de 80% des  patients bipolaires, notamment ceux qui ont commencé assez tôt leur trouble.


01/05/2013
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