Le poète Rainer Maria Rilke et LETTRES A UN JEUNE POETE
Rainer Maria Rilke
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Rainer Maria Rilke est un poète autrichien, né le 4 décembre 1875 à Prague, mort le 30 décembre 1926 à Montreux, en Suisse. Il vécut à Veyras de 1921 à sa mort.
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Biographie [modifier]
Rainer Maria Rilke est né à Prague en 1875, dans une famille qui le destina très rapidement à la carrière des armes.
Il est ainsi pensionnaire dans une école militaire avant d'être renvoyé en 1891 pour inaptitude physique. Il étudie alors le commerce avant de revenir à Prague où il exerce le métier de journaliste et écrit ses premières œuvres.
En 1896, il part pour Munich et rencontre , en mai 1897, Lou Andreas-Salomé, qui avait alors trente six ans.[1]. Son amour enflammé se transforme progressivement en amitié réciproque et en admiration mutuelle se poursuivant jusqu'à la fin de sa vie. En 1897, il change de prénom : de René Maria, il devient Rainer Maria. Il voyage en Italie puis en Russie avec Lou et son mari. Il rencontre à cette occasion en 1899 Léon Tolstoï.
En 1901, il épouse Clara Westhoff, une élève d'Auguste Rodin, avec qui il aura une fille, Ruth. Le couple se sépare un an plus tard et Rilke rejoint Paris où il devient en 1905 secrétaire de Rodin. Il rompt avec ce dernier et voyage dans toute l'Europe et au-delà de 1907 à 1910 (Afrique du Nord, Égypte, Berlin, Espagne, Venise, Aix-en-Provence, Arles, Avignon). Il abandonne peu à peu la prose pour se consacrer à la poésie, plus apte selon lui à restituer les "méandres de l'âme".
En 1910, il fait la rencontre décisive de la princesse Marie von Thurn und Taxis, née Hohenlohe-Waldenburg-Schillingsfürst, dans son château de Duino, alors en territoire autrichien, sur les bords de l'Adriatique. Elle l'hébergera fréquemment et sera son mécène jusqu'en 1920. Pour elle, il composera son chef d'œuvre, les Élégies de Duino, suite d'élégies empreintes d'une mélancolie lumineuse. Il est mobilisé dans l'infanterie lors de la Première Guerre mondiale mais revient rapidement à la vie civile.
À partir de 1919, il rejoint la Suisse et compose plusieurs recueils de poésies en français. En 1921, un industriel et mécène de Winterthur, Werner Reinhart, lui achète la tour isolée de Muzot, près de Sierre, dont il fera sa résidence.
Il décède d'une leucémie en 1926 et est inhumé à Rarogne en Valais.
Son œuvre [modifier]
- Vie et chanson (1894) ;
- Dans l'attente du chemin de la vie (1896) ;
- Maintenant et à l'heure de notre mort (1896) ;
- Offrandes aux lares (1895), recueil de poésies ;
- Couronné de rêve (1896), recueil de poésie ;
- Pour le gel matinal (1897) ;
- Avent (1898) ;
- Sans présent (1898) ;
- Vers la vie (1898) ;
- Au fil de la vie (1898), recueil de nouvelles ;
- Le livre d'images (1899) ;
- Histoires du bon Dieu (1900) ;
- Le livre de la pauvreté et de la mort (1903) ;
- La chanson de l'amour et de la mort du cornette Christophe Rilke (1904) ;
- Le livre de la vie monastique (1905) ;
- Lettres à un jeune poète (1903-1908) ;
- Requiem (1909) ;
- Les carnets de Malte Laurids Brigge (1910)
- La vie de Marie (1913) ;
- Rumeur des âges (1919) ;
- Élégies de Duino (1922) ;
- Sonnets à Orphée (1922) ;
- Vergers (1926) (en français) ;
- Quatrains Valaisans (1926).
Notes et références [modifier]
- ↑ Rainer Maria Rilke Journaux de jeunesse, Seuil, ISBN 2-02-010941-7
Poème [modifier]
Rilke a écrit la plupart de ses poèmes en allemand mais celui-ci en français.
L'Attente
C'est la vie au ralenti,
c'est le cœur à rebours,
c'est une espérance et demie:
trop et trop peu à son tour.
C'est le train qui s'arrête en plein
chemin sans nulle station
et on entend le grillon
et on contemple en vain
penché à la portière,
d'un vent que l'on sent, agités
les prés fleuris, les prés
que l'arrêt rend imaginaires.
(1926)
Article connexe [modifier]
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Auteur Rainer Maria Rilke Lettres à un jeune poète ("méditation sur la solitude, la création, l'accomplissement intérieur") est l'une des oeuvres les plus connue et les plus accessibles de Rainer Maria Rilke. L'aventure poétique de Rainer Maria Rilke n'est pas limitée à la seule création, elle recèle également une réflexion sur l'acte littéraire.Dans les Lettres à un jeune poète, l'auteur révèle ses doutes tout autant que ses joies de créateur. Il répond à une longue missive qui lui fut envoyée par Franz Xaver Kappus, âgé de 20 ans, dans laquelle le jeune homme se confiait entièrement à lui. Les dix lettres qui constituent ce recueil ont été écrites par Rilke entre 1903 et 1908. Elles retracent le processus de maturation de l'auteur tout autant qu'elles portent en germe les thèmes centraux des Élégies de Duino et Sonnets à Orphée, ses oeuvres maîtresses. Rilke endosse à l'égard de Kappus le rôle de guide, cherchant à clarifier les enjeux essentiels de la poésie. Il lui fait part de la solitude nécessaire à toute entreprise littéraire, de la confrontation vitale avec la réalité crue, et lui fait pressentir le bonheur des "aubes nouvelles", ces extases fugaces qui compensent la douleur de l'enfantement poétique. Un voyage aux sources de la création. --Lenaïc Gravis et Jocelyn Blériot
Une seule chose est nécessaire: la solitude. La grande solitude intérieure. Aller en soi-même, et ne rencontrer, des heures durant, personne - c'est à cela qu'il faut parvenir. Etre seul comme l'enfant est seul quand les grandes personnes vont et viennent, mêlées à des choses qui semblent grandes à l'enfant et importantes du seul fait que les grandes personnes s'en affairent et que l'enfant ne comprend rien à ce qu'elle font. S'il n'est pas de communion entre les hommes et vous, essayez d'être prêt des choses: elles ne vous abandonneront pas. Il y a encore des nuits, il y a encore des vents qui agitent les arbres et courent sur les pays. Dans le monde des choses et celui des bêtes, tout est plein d'évènements auxquels vous pouvez prendre part. Les enfants sont toujours comme l'enfant que vous fûtes: tristes et heureux; et si vous pensez à votre enfance, vous revivez parmi eux, parmi les enfants secrets. Les grandes personnes ne sont rien, leur dignité ne répond à rien.
[...] Cherchez en vous-mêmes. Explorez la raison qui vous commande d'écrire; examinez si elle plonge ses racines au plus profond de votre coeur; faites-vous cet aveu : devriez-vous mourir s'il vous était interdit d'écrire. Ceci surtout : demandez-vous à l'heure la plus silencieuse de votre nuit; me faut-il écrire ? Creusez en vous-mêmes à la recherche d'une réponse profonde. Et si celle-ci devait être affirmative, s'il vous était donné d'aller à la rencontre de cette grave question avec un fort et simple "il le faut", alors bâtissez votre vie selon cette nécessité; votre vie, jusqu'en son heure la plus indifférente et la plus infime, doit être le signe et le témoignage de cette impulsion. Puis vous vous approcherez de la nature. Puis vous essayerez, comme un premier homme, de dire ce que vous voyez et vivez, aimez et perdez. N'écrivez pas de poèmes d'amour; évitez d'abord les formes qui sont trop courantes et trop habituelles : ce sont les plus difficiles, car il faut la force de la maturité pour donner, là où de bonnes et parfois brillantes traditions se présentent en foule, ce qui vous est propre. Laissez-donc les motifs communs pour ceux que vous offre votre propre quotidien; décrivez vos tristesses et vos désirs, les pensées fugaces et la foi en quelque beauté. Décrivez tout cela avec une sincérité profonde, paisible et humble, et utilisez, pour vous exprimer, les choses qui vous entourent, les images de vos rêves et les objets de votre souvenir. Si votre quotidien vous paraît pauvre, ne l'accusez pas; accusez-vous vous-même, dites-vous que vous n'êtes pas assez poète pour appeler à vous ses richesses; car pour celui qui crée il n'y a pas de pauvreté, pas de lieu pauvre et indifférent. Et fussiez-vous même dans une prison dont les murs ne laisseraient parvenir à vos sens aucune des rumeurs du monde, n'auriez-vous pas alors toujours votre enfance, cette délicieuse et royale richesse, ce trésor des souvenirs ? Tournez vers elle votre attention. Cherchez à faire resurgir les sensations englouties de ce vaste passé; votre personalité s'affirmira, votre solitude s'étendra pour devenir une demeure de douce lumière, loin de laquelle passera le bruit des autres. Les lettres à un jeune poète sont tout autant des lettres écrites par un jeune poète –Rilke a vingt-sept ans lorsqu'il répond pour la première fois , trente-deux ans lorsqu'il écrit la dernière lettre publiée- à un jeune homme dont la figure précise reste dans l'ombre de sorte qu'il devient, pour ainsi dire, l'éponyme, moins d'un âge, que d'une période de la vie, définie par un type de dilemmes. La force de ces lettres et leur très vaste lectorat tient d'abord à ceci que ce qu'on lit dans les réponses de Rilke prend un tour quasi universel en même temps qu'il y a suffisamment d'indications particulières pour ancrer la personne de Franz Kappus dans une réalité individuelle. C'est que ce dernier traverse ce moment inévitable, mais irréductiblement singulier dans l'expérience, au cours duquel chacun s'efforce de "passer" vers le monde adulte et de parvenir à être enfin vraiment soi-même. La poésie bien sûr n'est pas absente de ces lettres, mais c'est d'abord parce qu'elle est recherche d'une vérité intime. Il s'agit tout autant d'écriture en général, de création artistique, que, pour finir, de la raison intime qui détermine le choix d'existence que tout un chacun peut vouloir découvrir en soi. Extrait de la préface du traducteur. "Paresse ou incompréhension, j'ai souvent eu de grandes difficultés à lire. J'ai plongé dans cette lecture sans reprendre mon souffle. Ma rencontre avec ces lettres reste un choc; une émotion au bord des larmes. J'aimerais vous faire partager cette émotion, et vous faire entendre toute la grandeur, toute la beauté de cette méditation intérieure." Barbara (Courant octobre 1991, Barbara, pour les éditions Claudine Ducaté enregistre Les lettres à un jeune poète de Rainer Maria Rilke. Dix lettres plus un sonnet de Franz Kappus sont lues. L'enregistrement a été commercialisé uniquement en cassette audio.)
Nota : De l'importance de la traduction : Rilke aura été un défi aux traducteurs, ne fussent-ils conscients que de contribuer à la connaissance de la Weltliteratur. On ne compte plus les traductions des Lettres à un jeune poète, des Elégies de Duino (parfois traduites sous le titre Elégies duinésiennes) et des Sonnets à Orphée, sous la plume de traducteurs illustres ou non, mais dont le travail créateur nous aura toujours plus rapprochés du texte original; pour n'en retenir que quelques-uns, avec l'injustice que constitue ce type de liste: Arthur Adamov, Maurice Betz, Armel Guerne, Philippe Jaccottet, Jean-Yves Masson, Armand Robin, Claude Vigée. Tâche oh ! combien difficile, quand on sait que Rilke écrivit aussi des oeuvres en français : le doute du traducteur est ici encore plus fort que dans d'autres cas de traduction ! N'a-t-il pas sans cesse en tête l'anecdote du chant contenu dans les Carnets de Malte Laurids Brigge ? Alors que Rilke prise la traduction de la prose traduite par Maurice Betz, Rilke traduit lui-même ce chant et sa version lui semble " reproduire à peu près cet élan rythmique qui, dans le texte allemand, fait que la voix de la jeune fille s'élève au-dessus de la prose et se détache d'elle de son propre essor ". En fait, peu de poèmes avaient été traduits du temps de Rilke; quant à ses poèmes français, auxquels il a donné le même nom que celui de ses poèmes allemands, ils sont loin d'être des traductions. Comme le souligne Gerald Stieg: " Bref, Rilke, le maître traducteur, est convaincu que la traduction de ses poèmes en français n'est ni possible ni souhaitable ". Dans ces conditions, forts de l'expérience notamment de Rilke lui-même où, pour magnifier la musique, la traduction attente au sens, les traducteurs (Rémy Colombat, Jean-Claude Crespy, Dominique Iehl, Rémy Lambrechts, Marc de Launay, Jean-Pierre Lefebvre, Jacques Legrand, Marc Petit et Maurice Regnault) ont accordé la priorité aux structures sémantiques, parti pris qui, vu la qualité du travail de ces derniers, a pour effet de rapprocher la poésie de Rilke de la poésie française actuelle. François Mathieu Petite remarque perso : S'il existe des livres de chevet, que l'on lit, relit et re-relit, Les lettres à un jeune poète en sont l'incarnation la plus parfaite. Il y a toujours quelque chose à "tirer" de ce genre d'ouvrage. Il nous aide à grandir, à sortir d'une situation difficile. Et jamais on ne se lasse de le prendre et de le reprendre. Il touche à notre intimité profonde, dit ce que nous pensons, ce que nous voudrions savoir dire. Et nous montre l'humanité telle que nous voudrions la connâitre et surtout l'être... Nous ouvre le chemin. Intemporel |
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