Séquestration du dioxyde de carbone
Séquestration du dioxyde de carbone
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La séquestration du dioxyde de carbone (parfois piégeage ou emprisonnement) — c'est-à-dire le stockage du dioxyde de carbone hors de l'atmosphère — peut se faire de plusieurs façon :
- de manière naturelle : par un puits de carbone, où le carbone est fixé dans les végétaux et les océans.
- de manière artificielle : par la séquestration et le stockage du dioxyde de carbone dans le sol, les océans et par inertage.
La séquestration naturelle est un enjeu important pour la protection et la stabilité du climat, et la séquestration artificielle est une des pistes explorées par certains chercheurs et certaines entreprises[1] pour atténuer les effets du réchauffement climatique et notamment dans le cadre du protocole de Kyōto.
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Séquestration artificielle [modifier]
Le dioxyde de carbone pourrait théoriquement être massivement enfoui de manière sécurisée.
Trois lieux et modes de séquestration sont considérées :
- le substrat géologique rocheux (pour une capacité estimée d'environ 2000 gitatonnes de CO2 , selon le GIEC qui estime qu'avec des technologies à développer et valider, et une surveillance appropriée, plus de 99% du CO2 injecté sur 1.000 ans pourrait ainsi être emprisonné pour plusieurs millions d'années), par injection via des puits sous forme gazeuse supercritique dans des roches perméables ou dans des « cavités » souterraines jugées suffisamment hermétiques. Hormis pour l'inertage, les technologies dérivent de l'industrie pétrolière (caractérisation de réservoirs potentiels, forages, gazoduc, compression) qui se positionne sur ce nouveau marché lui permettant de justifier la poursuite de l'exploitation du carbone fossile.
- les grands fonds océaniques (stockage provisoire et incertain, et à haut risque pour la biodiversité des grands fonds)
- l'inertage sous forme de carbonates minéraux reconstitués (solution copiant la nature, mais coûteuse en énergie)
Séquestration dans le substrat géologique rocheux [modifier]
Si des solutions géotechnique étaient validées et efficaces, selon GIEC (en 2005), cette solution pourrait potentiellement répondre de 10% à 55% de l'effort total de réduction à envisager pour le siècle 2000-2100, mais leur fiabilité à long et très long terme reste discutée, notamment face au risque sismique.
Dans des gisements : Les gisements de gaz naturel et de pétrole sont les candidats les plus cités pour y séquestrer du CO2. L'injection de CO2 dans des gisements pétroliers étant d'ailleurs déjà pratiqué depuis des décennies (surtout au Texas), à des fins de récupération assistée : Puissant solvant, le CO2 supercritique aide à récupérer une partie du pétrole résiduel de gisements difficiles ou en baisse de production. Néanmoins, la grande majorité des projets de récupération assistée à base de CO2 (CO2-EOR, pour enhanced oil recovery) entrepris jusqu'à présent utilisent du CO2 issu de sources naturelles.
Dans des veines de charbon ? Le méthane de veines de charbon non exploitées pourrait être exploité et remplacé par du CO2, la vente du méthane finançant le stockage du CO2. Réinjecter du gaz dans les pores du charbon est théoriquement possible si les couches ne se sont pas tassées après extraction. Des pilotes expérimentaux testent cette solution, qui pourraient éventuellement être associée à la gazéification du charbon, si des méthodes probantes et sécurisées étaient développées.
Les aquifères salins sont géologiquement pour partie comparables aux gisements d'hydrocarbures, mais avec une capacité bien plus grande. Plusieurs mécanismes de piégeage semblent pouvoir y immobiliser le CO2, avec moins de risque de fuite que dans les bassins houiller ou certains champs pétrolifères criblés de puits et parfois victimes d'affaissements.
Autres lieux ? Les solutions aujourd'hui envisagées visent toujours des bassins sédimentaires. Dans des régions volcaniques, le basalte présente parfois une alternance de couches poreuses et de couches étanches, qui pourraient aussi servir à stocker du CO2.
Le stockage géologique entre des strates de schistes serait aussi envisagé.
Stockage dans les fonds océaniques [modifier]
Les trois approches sont les plus cités sont :
- ensemencement des horizons marins superficielles par du fer (facteur limitant) pour doper la croissance de plancton, dont la nécromasse piégerait le plancton. En 1990 l’océanographe John Martin dans la revue scientifique Nature montrait que le fer dopait la croissance du phytoplancton. L'idée a germé qu'on pourrait hors de zones déjà eutrophes ou dystrophes « fertiliser » artificiellement la mer pour accélérer sa fonction de «pompe biologique à carbone» (qui absorbe de 10 et 20 milliards de tonnes de carbone par an dans les sédiments marins). De 2012 à 2005, 12 fertilisations artificielles ont été testées, mais seules trois d'entre elles ont pu faire la preuve qu'il y a réellement eu séquestration de carbone, souligne le biogéochimiste Philip Boyd[2], et on ignore ce qu'il est advenu à long terme du carbone.
- « dissolution » par injection de CO2 dans le bas de la colonne d'eau de mer (à au moins 1000 m de profondeur), avec le risque de dispersion de ce carbone sous forme d'acide carbonique, et d'impacts mal maitrisables liés à l'acidification de l'eau, ce pourquoi certains ont proposé une injection profonde de CO2, directement dans des fosses marines (à 3000 m et plus), où on espère que le CO2 formerait durant un certain temps un lac plus lourd que l’eau de mer, ralentissant sa dissolution du CO2 dans l'environnement.
- Conversion de CO2 en bicarbonates, hydrates ou matière organique évoluant vers une nécromasse riche en carbone sédimentant.
Stockage minéral [modifier]
Le stockage sous forme stable et inertée (par exemple de carbonates) est la solution évaluée la plus sûre et durable, mais pour le moment la plus coûteuse et non techniquement maîtrisée à grande échelle.
Impacts environnementaux [modifier]
Ils semblent tous problématiques ou potentiellement négatifs, bien que difficiles à modéliser faute de connaissance suffisante sur l'écologie des grands fonds et sur le fonctionnement écosystèmique de l'océan mondial (en particulier les très nombreux virus marins qui "contrôlent" et limitent la croissance du plancton et les effets de la méthanisation). Le CO2 forme avec l’eau de l'acide carbonique (H2CO3) qui tuerait les formes de vies des zones où il serait massivement injecté. S’il diffusait dans la colonne d’eau, il attaquerait aussi certaines formes de vie planctonique, les coraux et roches calcaires qui sont un puits de carbone. Les effets de l’augmentation du CO2 sur la vie benthique, bathypélagique et abyssalopélagique ou hadopélagique, en particulier de l'acidification sont encore peu étudiés et très mal compris. En particulier le dopage de l'activité planctonique peut se traduire par des zones marines mortes, une méthanisation accrue dans les sédiments et/ou la constitution d'hydrates de méthane dont le comportement en cas de réchauffement est encore inconnu, mais qui s'ils étaient brutalement relargués accéléreraient le réchauffement climatique.
La vie semble clairsemée dans les grands fonds, mais elle est densément présente autour des sources chaudes, et de manière générale elle semble jouer un rôle majeur dans les processus de sédimentation et le cycle du carbone. Le temps moyen de circulation de l’eau des grands fonds vers la surface est estimée à 1 600 ans environ, mais avec de grandes variations possibles selon les lieux, les courants et l’activité volcanique sous-marine (l’effet d’un tsunami sous-marin sur un stockage en profondeur, ou d'un tremblement de terre sur les hydrates de méthane pourrait être important. Si du méthane gagnait brutalement et massivement la surface et l’atmosphère, il y accélérerait fortement le réchauffement, d’autant plus vite qu’il aurait au passage dégradé les puits biologiques océaniques de carbone (Cf Phénomène de zone morte)
Coûts : 40 à 80 dollars US la tonne. (à la valeur de 2002 de l’US D) pour une séquesteration de CO2 liquide, à partir de la centrale thermique, incluant le transport et la décharge dans les océans.
Une autre solution de séquestration proposée a été de jeter dans les fonds océaniques une grande quantité de biomasse végétale dans les zones où des courants plongent vers les grands fonds, par exemple face à l'estuaire du Mississipi, au golfe du Mexique ou au Nil, mais on trouve déjà des zones mortes sur ces sites et le risque de conséquences écologiques inattendues est très important.
Le stockage minéral inerte, via la production de carbonates - si elle semble sûre - est aussi financièrement exhorbitante et coûteuse en énergie (selon le GIEC (2005), il faudrait avec les technologies actuelles augmenter de 60 à 180% de la consommation de carburant des centrales thermiques, augmentation ne pouvant qu'être partiellement compensée par des technologies plus efficientes.
Des méthodes utilisant la catalyse ou inspirées des processus biochimiques naturels sont à l'étude.
Voir aussi [modifier]
Liens internes [modifier]
Liens externes [modifier]
Notes et références [modifier]
Bibliographie [modifier]
- ↑ Ex : la société américaine Planktos espèrait fin 2007 avec 5 euros en épandant du fer dans l'océan piéger 1 tonne de carbone (théoriquement vendable 70 euros sur le marché), mais l'efficacité du processus n'a pas été à la hauteur (30 à 50 fois moins que prévu par l'entreprise selon un reportage de Libération intitulé « Bras de fer avec la mer » , du 8 janvier 2008 Voir)
- ↑ Institut de recherche sur l’eau et l’atmosphère, et Université d'Otago (Nouvelle-Zélande, Page personnelle, avec biblio)