Une égalité réelle pour les enfants handicapés
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La France a été condamnée en 2003 pour la faible scolarisation des enfants autistes.
Une égalité réelle pour les enfants handicapés
Par Damien ROETS
QUOTIDIEN : vendredi 4 mai 2007
DAMIEN ROETS, membre du conseil d'administration d'Epilepsie-France, maître de conférences à l'université de Limoges.
S'agissant de la douloureuse question de la scolarisation des enfants handicapés, lors du débat qui l'opposait mercredi soir à Ségolène Royal, Nicolas Sarkozy a proposé de faire de ladite scolarisation un «droit opposable». D'aucuns seront peut-être tentés de saluer une telle «révolution». Il faut toutefois rappeler que ce droit existe déjà. Selon le code de l'éducation, «le service public de l'éducation assure une formation scolaire, professionnelle ou supérieure aux enfants, aux adolescents et aux adultes présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant».
Sur la base des dispositions (issues de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées), il est d'ores et déjà possible à des parents de faire reconnaître la responsabilité de l'Etat pour défaut de scolarisation par le juge administratif. Une telle action est rarement exercée.
Il importe ici de souligner un point fondamental : pour les parents, saisir le juge administratif pour permettre à leur enfant d'être scolarisé est, à l'évidence, une solution de dernier recours, intervenant au terme d'un combat à la fois épuisant et humiliant. Depuis longtemps, la question fondamentale est en réalité celle de l'effectivité du droit à la scolarisation des enfants handicapés. Une chose a été de voter la loi du 11 février 2005, une autre eût été de donner les moyens à l'école d'accueillir ces enfants, trop d'entre eux étant, aujourd'hui encore, de facto, déscolarisés (à cause, notamment, d'un nombre notoirement insuffisant d'auxiliaires de vie scolaire). Il faut d'ailleurs rappeler que la France a été condamnée par le Comité européen des droits sociaux le 4 novembre 2003 dans une décision autisme-Europe c/France, décision dans laquelle le comité constate que le nombre d'enfants autistes scolarisés en France demeure «extrêmement faible» et affirme qu' «il faut non seulement, dans une société démocratique, percevoir la diversité humaine de manière positive, mais aussi réagir de façon appropriée afin de garantir une égalité réelle et efficace» . Ce faisant, le Comité européen des droits sociaux s'inscrit dans la même veine que la Cour européenne des droits de l'homme, pour qui, dans une société démocratique, il importe de «protéger des droits non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs»... Nos gouvernants devraient plus souvent s'inspirer de cette très pertinente jurisprudence européenne, la technique de l'affichage législatif n'étant trop souvent qu'un trompe-l'oeil destiné aux futurs électeurs...