Vivre avec un cyclothymique : sortir de l’impuissance et amener à l’apaisement

 

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Vivre avec un cyclothymique : sortir de l’impuissance et amener à l’apaisement

25/05/2012
Auteur : M Trybou

Bipo / Cyclo > Bipolarité adulte > Amour, sexe, couple

Quelques pistes pour mieux vivre son couple avec un cyclothymique.
« - Avec toi, on ne sait jamais sur quel pied danser !
- Mais je ne sais même pas moi-même sur quel pied je danse !
»

Vivre avec une personne cyclothymique est un grand défi. Le cyclothymique a de multiples visages : Un coup il est charmeur, sensible, capable d’une immense compréhension et d’une profonde complicité. Une autre fois il est le roi du pétrole, a mille projets dont vous ne faites plus forcément partie (ou alors il vous embarque dans un tour du monde irréaliste). Parfois il est prostré, dans son coin, à fixer un point dans l’espace, sans un mot. Et à d’autres moments il est sur des braises, cherche le conflit, attend le bon moment pour que tout dérape, explose, pour vous chercher, vous mettre à l’épreuve et vider son agressivité sur vous, quitte à déballer des horreurs.

Sans traitement médicamenteux, autant dire que la vie avec un cyclothymique est compliquée : il n’est pas constant dans ses envies et ses projets, pas constant dans ses engagements, parfois bien plus dans un mode « j’ai besoin de toi par survie » plutôt que dans un vrai amour. L’entourage a souvent l’impression d’être bien plus un infirmier à domicile qu’un être humain désiré. C’est d’autant plus dommage qu’un cyclothymique stable est capable comme tout le monde de fonder un foyer et de réussir professionnellement. Certains ont déjà posé de très bonnes bases même sans traitement.

Mais indépendamment du traitement, qui va calmer l’intensité des émotions et l’inconstance de l’humeur, c’est aussi la compréhension de la maladie et le repérage de ses symptômes qui va être vital.

Le rôle du cyclothymique dans son couple amoureux

Le cyclothymique a différentes missions s’il veut vivre heureux en famille :
  • Apprendre à repérer les symptômes annonciateurs de dépression, et l’annoncer à son entourage afin que celui-ci, selon ce que le cyclothymique demande, le laisse tranquille ou lui fasse des propositions pour l’aider à se remettre en mouvement. Il est donc important que le cyclothymique repère les manifestations de sa maladie et explique clairement à son entourage ce qu’il attend de lui. L’entourage ne peut pas tout comprendre et sait très bien qu’une bonne action peut souvent être contre productive. A certains moments le cyclothymique a besoin de calme, à d’autres moments de bras affectueux, à d’autres moments qu’on le fasse rire. Et cela ne peut être mis en place que si l’entourage est mis au courant.
  • Apprendre à repérer et casser au plus vite les symptômes d’hypomanie avant que le cerveau ne se fatigue (trop d’énergie, manque de sommeil, alcool, drogue, café, …) et ne retombe en dépression. Le cyclothymique peut donner à son entourage la liste des comportements qu’il a repérés quand il est en hypomanie, afin que son entourage lui signale s’il repère quelque chose. En hypomanie, il est dur de se refreiner et l’entourage est vite vécu comme un obstacle. Il est donc nécessaire que les choses soient bien claires et que le cyclothymique, même s’il a souvent l’impression d’être regardé et observé sous toutes les coutures à longueur de journée, soit bien clair sur ce qu’il attend de son entourage et n’invalide pas ce qu’il a lui-même demandé.
  • Apprendre à sortir de la maison ou de la pièce quand il y a un conflit plutôt qu’insister pour avoir le dernier mot : l’entourage doit être au courant quand le cyclothymique est irritable, a passé une mauvaise journée, est à fleur de peau. Le cyclothymique ne doit pas attendre que l’entourage devine les choses. Le cyclothymique doit s’engager à quitter la pièce quand la tension monte, et aller reposer son cerveau hypersensible une bonne heure, quitte à reprendre la conversation plus tard à tête reposée. Et l’entourage ne doit pas pourchasser dans toute la maison le cyclothymique, pensant que celui-ci fuit la discussion ou fait sa mauvaise tête.
  • Le cyclothymique doit lister les sujets qui fâchent, les points délicats chez lui (hypersensibilité, injustice, impression qu’on ne le croit pas fiable, pas digne de confiance, qu’on ne l’aime pas vraiment) et souvent en reparler avec son entourage. L’entourage, de son côté, même s’il vit avec une personne malade, doit accepter de ne pas voir la personne que comme malade car il n’a rien de plus intrusif, humiliant et rabaissant qu’être considéré comme une personne fragile, comme un enfant incapable de se prendre en charge. Là aussi les choses doivent être discutées et un juste milieu trouvé. Le cyclothymique doit garder en tête que c’est parce qu’on le considère comme une personne à part entière que l’on est encore avec lui. Et il doit aussi garder en tête que c’est parce qu’on a la plus grande considération pour sa fragilité et sa sensibilité que l’on ne le catalogue pas « fou furieux ». C’est un milieu entre « je te considère normal » et « je sais que tu as une maladie des émotions » qui est difficile à trouver. Miser trop sur le premier au détriment du second et c’est l’incompréhension en cas de changement d’humeur ou de conflit. Miser trop sur le second au détriment du premier et c’est enfoncer la personne dans un système d’assistanat et de révolte qui fera exploser la relation. Les deux sont donc nécessaires et le dosage doit se faire dans la concertation.

Le rôle du conjoint face au cyclothymique

L’entourage a différentes missions s’il veut vivre heureux avec un cyclothymique :
  • S’informer sur les manifestations de la maladie, bien connaître comment déprime le cyclothymique (et dans quel sens : est ce qu’il est d’abord fatigué puis irritable ? il perd confiance en lui puis il s’isole ?) afin de ne pas s’étonner ce qui va se passer. Lui demander ce qu’il attend de nous quand il déprime, et ce qu’on ne doit surtout pas faire ou dire. En hypomanie, l’entourage doit demander ce qu’il est censé faire, comme par exemple ne rien dire (et le cyclothymique apprend à se limiter seul) ou à l’aider à mettre des limites à ne pas dépasser : « Quand tu étais stable la dernière fois, tu m’as dit que je devais te rappeler de ne pas dépasser deux verres en soirée ». Les symptômes doivent être repérés et les compromis mis en place. L’entourage est là pour signaler, et uniquement signaler ce que le cyclothymique lui a demandé de lui signaler, pas pour épier ou faire office de médecins à domicile, ce qui risque de mettre le cyclothymique dans une position désagréable de « créature étrange auscultée constamment et sous toutes les coutures ».
  • Ne pas entrer dans les conflits quand le cyclothymique est irritable, les reporter à plus tard, ne pas commencer à négocier ou se justifier : on demande au cyclothymique d’aller faire un tour, de calmer ses neurones, et quand la cocotte minute sera plus calme, on pourra discuter.
  • L’entourage n’est pas là pour vérifier les médicaments, faire office de réveil le matin, accompagner aux rendez-vous, sauf si le cyclothymique le demande. Aider c’est bien quand une aide est clairement demandée. Aider quand on n’a pas été invité à le faire, sera vécu comme un assistanat humiliant. Les cyclothymiques étant très sensibles, ils percevront une aide non demandée comme une preuve qu’on les considère comme des enfants incapables de se prendre en charge, et entreront en révolte. L’entourage peut manifester son intérêt à rencontrer les psychiatres et psychologues du cyclothymique afin d’apporter leur vécu, glaner des techniques. Le cyclothymique sera certainement content de cette implication, mais à nouveau elle doit être faite dans la concertation.
En résumé, s’informer, repérer, anticiper, faire un compromis sur qui attend quoi et qui a besoin de quoi, sont les maillons nécessaires d’une relation qui fonctionne.

juin 2012



30/04/2013
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