Qu'est-ce que la normalité en psychiatrie ?

 

Qu'est-ce que la normalité en psychiatrie ?

Qu'est-ce que la normalité en psychiatrie ?La norme et la normalité sont toujours difficiles à définir en médecine, et plus encore en psychiatrie. Pour Édouard Zarifian, la normalité psychique dépend de la personnalité propre et du contexte social.

Définir le normal et le pathologique, ou l'anormal, est déjà bien délicat en médecine somatique. En psychiatrie, cette définition est encore plus complexe et fragile. C'est ce que nous dit Édouard Zarifian, professeur de psychiatrie, dans le texte suivant (les intertitres sont de la rédaction) :" [ Chacun des troubles dits " psychiques "], du plus banal (l'anxiété) au plus complexe (le monde des schizophrénies), s'exprime de manière multiforme. Les symptômes (crise d'angoisse, hallucination, humeur dépressive) renvoient à des mécanismes biologiques et peuvent être traités par des médicaments.

Chaque symptôme a un sens qui n'a de valeur que pour un individu

Toutefois, le biologique n'est qu'un aspect d'une trilogie qui comprend aussi le psychologique et le social. En effet, tout symptôme a un sens qui n'a de valeur que pour un individu bien déterminé. Une crise d'angoisse n'est pas univoque. Elle est le reflet de la singularité même de l'individu qui en est affecté. Ce sens - propre à chaque patient - implique ce que l'on nomme - faute de mieux - " l'appareil psychique ". C'est la (ou les) psychothérapie(s) - d'inspiration analytique - qui donne(nt) sens aux symptômes. De plus, l'être humain ne vit pas isolé de ses semblables. L'une des grandes difficultés de l'existence consiste précisément à " co "-exister . Les rapports inévitables avec ceux qui nous entourent forment la troisième dimension de l'espace dans lequel évolue tout être humain. Dès lors, la psychiatrie - comme les comportements humains normaux ou pathologiques - ne peut obéir au modèle médical strict.

La " normalité " dépend du contexte social

Qui plus est, la " normalité " repose en médecine somatique sur des notions mathématiques bien définies, comme celle d'écart par rapport à la moyenne. En psychiatrie, il n'en est rien. La norme implique forcément des données culturelles, géographiques, temporelles, etc. Ce qui était " normal ", en matière de rapports sociaux, d'habillement, etc., dans le Paris du XIXe siècle ne l'est plus dans celui d'aujourd'hui. Ce qui est " normal " dans les échanges entre individus varie selon qu'on se trouve en Tasmanie, à Kyoto ou à Bécon-les-Bruyères ! La " norme " n'est que la convention d'un groupe social en un lieu donné, à un moment donné

Attention aux étiquettes d'

On peut donc très vite être taxé d' " anormal ". Votre vêtement, la couleur de vos cheveux, votre manière de vous exprimer ou ... vos idées doivent s'inscrire " normalement " dans un contexte où on les juge adaptés. Dans un autre contexte, vous passez pour " anormal ", donc suspect de présenter un danger potentiel. Un pas de plus dans la différence et on vous juge fou ou délinquant. Comme le mot " fou " gêne un peu et renvoie à des définitions archaïques, comme la délinquance conduirait à des prisons qui sont saturées, la récupération par la médecine présente tous les avantages. On pose un diagnostic et on entre dans un circuit bien balisé qui saura évincer le sujet dérangeant et lui proposera une " réhabilitation " normative. "


Cet article n'a pas fait l'objet de révision depuis cette date. Il figure dans le planning de mises à jour de la rédaction.

Sources : Zarifian É. " Des paradis plein la tête " Odile Jacob éd. (coll. opus), Paris 1997.



27/05/2013
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